L
e lieutenant Martel se retrouve dans une drôle de situation. Lui, l’ancien royaliste, qui a combattu jusqu’au bout les révolutionnaires avec Monsieur de Charrette, est maintenant membre de la garde rapprochée de l’Empereur. Ce dernier en fait même son protecteur attitré. La tâche risque de ne pas être de tout repos. Napoléon aime aller prendre la température sur le terrain sans une cohorte de gardes alors que, d’un côté, dans son propre camp, certains veulent l’abattre, et de l’autre, les Russes se sont ressaisis et passent à l’offensive.
Patrice Ordas choisit de plonger Napoléon Bonaparte dans une histoire fictive pourtant tout à fait plausible. S’appuyant sur le contexte historique de la retraite de Russie, il imagine une opération dans laquelle le dirigeant français est exfiltré et suit le gros de l’armée, menée par un sosie, en compagnie d’une petite troupe de vétérans. Repérés, ils doivent se réfugier dans une ferme et soutenir l’assaut d’un groupe de francs-tireurs cosaques. Dans une ambiance « à la Fort Alamo », le scénariste fait monter la tension autour d’un Empereur que l’on découvre tour à tour intelligent, volontaire, soucieux de son image, mais aussi entêté, froid et même fragile. Si les autres personnages principaux occupent des rôles un peu plus conventionnels, cela ne nuit pas trop au déroulement d’un récit plutôt haletant. L’utilisation de l’argot, le dévouement héroïque des vieilles moustaches à leur « petit caporal » favorisent l'immersion dans cet univers.
Le dessin de Xavier Delaporte y contribue également. Son trait réaliste et son encrage donnent du relief et de la puissance à ses planches. Son travail sur les visages, même s’il n’est pas exempt de tous reproches, participe pleinement à l’intensité des émotions. La mise en couleur sombre de Sébastien Bouet colle agréablement avec la tonalité et le cadre de l’aventure.
La nuit de l’Empereur est plutôt agitée, pour notre plus grand plaisir.
Poster un avis sur cet album