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uelques années avant Speke et Burton, en 1850, Antoine d’Abbadie était sur le point de découvrir les sources du Nil, mais le Raïs ne souhaitait pas voir ses terres sacrées foulées par des pieds étrangers. L’expédition tourna alors court et le voyageur français obtint en guise de compensation Abdullah, un jeune orphelin, qu’il décida de ramener chez lui, à Hendaye. Malgré sa couleur de peau, ce dernier reçut une éducation bourgeoise et il aurait pu couler des jours heureux et paisibles près de sa famille d’adoption. Pourtant, ses rêves de gloire et d’aventures furent les plus forts et il décida de rejoindre les troupes de Napoléon III.
Un jeune africain arraché à son pays natal pour combattre avec l’armée française. Le pitch du tome cinq de L’Homme de L’Année a quelques accointances avec celui du premier opus, réussi, de la série, 1917. Malheureusement, la comparaison s’arrête là. Abdullah traverse deux décennies de l’Histoire sans prendre le soin d’accompagner le lecteur dans son voyage temporel. Les noms célèbres s’enchaînent, s’immiscent dans le récit, mais ne donnent jamais lieu à une mise en contexte. Une correspondance avec Alexandre Dumas, l’évocation de Speke et Burton ou de De Boisdeffre et Mac Mahon, l’apparition de Louise Michel ou de Jules Vallès… À moins d’être un érudit en la matière ou de passer outre ces différents clins d’œil, la lecture s’avère souvent frustrante.
Il faut néanmoins noter le joli travail de Benoît Dellac (Missi Dominici, Les Princes d’Ambre…). Très à l’aise dans les décors, il confère à l’ensemble de ses personnages une vraie « gueule ». Dommage que les couleurs en aplats, notamment pour les scènes en Afrique, manquent de nuances.
Un rapide survol à haute altitude des années 1850 à 1870 qui ne laissera en souvenir que quelques jolis clichés.
Dans cette collection de l’homme de l’année, ce titre est le moins réussi. On n’arrive pas à saisir l’exploit accompli par ce tirailleur africain. Il y a trop de flash-back sur une période passée en dressant la biographie du personnage et du coup, la révolution avortée de 1871 apparaît comme dénuée de portée. La collection est inégale ce qui est toujours le risque dans ces séries concepts.
On découvre néanmoins le turco de la Commune ce qui demeure un épisode plutôt méconnu qui avait inspiré Alphonse Daudet. Malgré une lecture un peu saccadée, cela se laisse lire. On découvre également la vie d’un soldat atypique dans un contexte qu’on n’imaginait pas.
Bref, un one-shot moins convaincant qu’à l’accoutumé.