C
ela fera bientôt deux ans que l'esprit de Noxolo gît prisonnier sur le sol, attendant d'être apaisé. Et la vieille sorcière invective les passants, en vain. Chargée de classer les dossiers en souffrance du commissariat de Tsakane, Nalaxa découvre cette affaire sordide qui n'a donné lieu à aucune enquête depuis la découverte du corps. Durant la nuit du 24 avril 2011, Noxolo, mère célibataire de 24 ans, a été violée et massacrée à coup de pierres par un groupe d'hommes.
"On va te montrer que tu es une vraie femme...". Avec son trait vif à la plume sèche, une épure en noir et blanc qui s'accorde avec la froide violence des mots, c'est un panorama au vitriol de la nation arc-en-ciel que dépeint Jean-Christophe Morandeau. En collaboration avec Amnesty International, Noxolo est une bande dessinée militante qui a pour objectif de dénoncer les "redressements" des homosexuels en Afrique du Sud. Dans ce pays qui se veut exemplaire en matière de respect des droits des minorités, certains cas de viol, de torture et leurs conséquences léthales ne sont pas un crime, mais un authentique acte éthique et altruiste, une « expédition curative » qui, selon certains, justifie l'impunité des bourreaux qui l'accomplissent. En se rapprochant d'une association LGBT (Lesbiennes, Gays, Bi et Trans) qui essaye de rendre le repos à l'âme tourmentée de la victime, la jeune Nalaxa va aussi se heurter à un mur de haine qui suinte de tous les pores de la société, à commencer par ceux de sa hiérarchie.
Un album coup-de-poing, aussi esthétique qu'efficace, qui ne peut laisser indifférent.
J'ai été assez ému par la tragédie de Noxolo, une jeune femme de 24 ans mère de deux enfants qui vît en Afrique du Sud dans un township non loin de Johannesburg. C'est une lesbienne qui a été victime d'un crime atroce le 23 avril 2011. Depuis, la police sud-africaine ferme les yeux et a bâclé insidieusement l'enquête. Il faut savoir que pourtant l'Afrique du Sud a adopté une loi très favorable à la cause gay. Cela ne suffit pas à faire évoluer les mentalités.
Amnesty International a décidé de se mobiliser autour de cette histoire afin que cette mort ne reste pas sans suite. C'est un combat à la construction d'un monde nouveau où l'on pourrait vivre sans craindre d'être tué parce qu'on est différent. Le célèbre écrivain Marc Levy a écrit l'une des plus belles postfaces de bande dessinée. Il conclut sur le fait que sur une terre où tant de misère existe, où tant de guerres sévissent, quelque soit la façon, aimer ne devrait jamais être un crime.