A
lors qu’il avait déjà adapté en bande dessinée L’invention de Morel, roman d’Adolfo Bioy Casares, Jean-Pierre Mourey s’attaque ici à une œuvre de Leo Perutz, écrivain juif d’expression allemande. Suivant une trame assez classique, Le cavalier suédois raconte l’histoire d’une substitution d’identité en temps de guerre. Subdivisé en quatre parties, le récit suit une progression linéaire et plutôt lente. Il s’accompagne aussi d’un récitatif très présent qui rappelle constamment son origine littéraire.
La couverture est porteuse de promesses : ce cavalier à la posture noble, dessiné dans un style qui se donne des airs de gravure, intrigue dès le premier coup d’œil. À vrai dire, la déception n’en sera peut-être que plus criante. Alors que le port altier du personnage laissait supposer un caractère bien trempé, il s’avère difficile, à la lecture, de ressentir un quelconque sentiment vis-à-vis de cet être qui se rapproche trop d’une certaine figure traditionnelle, celle de l’opportuniste. Il n’est ni bon, ni méchant, juste enclin à saisir les occasions qui se présentent. La froideur avec laquelle son parcours est présenté empêche toutefois d’aller plus loin dans la relation qui pourrait unir le héros au lecteur. Même le style graphique, pourtant de bonne tenue et fidèle d’un bout à l’autre à un parti-pris qui est à souligner, est plutôt de nature à instaurer une distance regrettable avec les péripéties des différents protagonistes.
La résolution de l’intrigue, pourtant inattaquable au niveau de la cohérence, en devient quasiment anecdotique, tant le déroulement du scénario avait fini par lasser.
Cette histoire d’usurpation d’identité n’a pas été très palpitante malgré une introduction assez intriguant. Le style parait assez vieillot, voir figé. L’imagerie austère semble d’un autre temps sans parler de la calligraphie. La narration sans être pesante m’est apparue comme un brin ennuyeux. On n’arrive pas à entrer dans ce récit avec la meilleure volonté du monde. Bref, cela le fait ou pas.
La substitution d’identité sur fond de campagne militaire mené par Charles XII de Suède sur la Pologne au début du XVIIIème siècle donnait de larges possibilités. Elles n’ont pas été exploitées à bon escient. On va se perdre au milieu de cette embrouille. Subtilité et raffinement pour les uns, classicisme et déception pour les autres.