- « Et toi Aurelie, tu savais qui c'était ce Mao ?
- Bien sûr, c’était un grand roi du Japon »
Contrairement ce que suggère son titre, ce n'est pas le défunt maître de la Chine qui est le sujet de cet album. Mais cela pourrait être un clin d’œil au M.A.O., le logiciel qui permet de concevoir le métré des routes wallonnes en piteux état qui vont être au cœur de l'intrigue. Dans un futur proche, la Belgique a cédé à ses pulsions séparatistes. La République Démocratique de Wallonie est sur le point d'acheter à la Chine la dépouille du Grand Timonier. Et, à travers différents points de vue croisés, le Sourire de Mao raconte cet événement historique tout en faisant un large état des lieux de cette utopie totalitaire.
Marion et Ludmilla font partie des Fauves de Hesbaye, les jeunesses féminines paramilitaires et assermentées auprès de la police qui s'apprêtent à composer la haie d'honneur du meeting du président « Capitaine » Delcominette. Des adolescentes en uniforme, « c'est bien plus sexy que le bataillon des commandos de Flawinne ». Le chef de l’État, omniprésent dans les médias, est le personnage ambigu du récit. D'apparence bonhomme, sympathique et jouisseur, il est la tête pensante d'un pays fascisant qui se tiers-mondialise : crise économique, pénurie alimentaire, réseau routier en déliquescence... Achevant de ruiner les finances exsangues du micro-pays, il négocie au prix fort l'achat de la momie pour en faire la pièce maîtresse de l'Espace Espoir, un musée d'un autre genre qui a pour vocation de valoriser non pas le passé de la Wallonie, mais son futur placé sous l'égide de la pensée du Grand Timonier. Pendant ce temps, d'étranges crimes se multiplient. Des membres des Fauves de Hesbaye et des Combattants de Liège, son pendant masculin, sont assassinés dans des circonstances douteuses : à l'aide de leur propre pistolet qu'ils ont au préalable remis à leur assassin. Antoine Wauthier, étudiant contestataire passionné de natation, sera la cible de cette machination. La boucle est bouclée et tous les acteurs vont se rejoindre sur les chaussées wallonnes pour un dénouement qui scellera le sort de la R.D.W.
C'est un récit déconcertant que délivrent Michel Constant et Jean-Luc Cornette. Dans une ambiance désuète, les premières pages font croire à une histoire qui se déroule chez des jeunes guides des années 70, issues de familles de la droite catholique. Tout bascule très vite dans l'anticipation, d'abord dans un registre comique servi par le ridicule et le côté "Hénaurme" des situations, puis le rire se fait de plus en plus gêné. Un sentiment de malaise croît lorsque le système répressif entre en jeu avec la complicité de médias aux échos très actuels, s'appuyant sur une réforme pénale hypocrite qui, sous couvert de sentiments charitables, s'avère être un outil de mise à mort des opposants politiques.
Avec cette politique-fiction douce et amère, teintée d'humour belge, Futuropolis confirme son talent de chasseur de pépites. Original et inattendu, le Sourire de Mao est une belle surprise, une rafraîchissante et pétillante pastille orwellienne made in Wallonie.
Le sourire de Mao est une bd assez étrange dans sa conception. Il faut dire que je ne m’étais pas trop renseigné sur le contexte.
En effet, on suit le parcours d’un homme politique belge assez nationaliste dans son identité wallonne. Il est également question de scouts qui font la loi et qui sont autorisés à un port d’arme. Bref, on dirait une bd d’anticipation politique.
Pour autant, c’est traité de manière si naturelle et si crédible qu’on se pose alors toutes ces questions. J’avoue avoir été assez déstabilisé par cette lecture d’autant que les premiers dialogues sont plutôt assommants. Les puzzles vont s’assembler petit à petit pour une meilleure lisibilité. Mais bon, il faut attendre la fin de l'album pour que cela soit satisfaisant...
N'étant pas belge, j'ai du mal à croire à cette histoire de complot fascisant dont le dénouement n'est pas très clair. Par contre les personnages sont attachants et la question de l'embrigadement des jeunes bien posée.
Et j'aime bien les dessins un peu rétro.
Je rejoins entièrement la critique de M. Leroy. A la fin, j'ai été dérouté et même un peu choqué. A part le ridicule du rachat de la momie de Mao, l'histoire passe bien et colle même à une certaine réalité de ce qu'a du être l'Allemagne nazie avec ses jeunesses hitlérienne.