L
a Communauté Européenne a transformé le continent. D'une mosaïque de pays en est sorti un seul grand marché. Le commerce prospère et les entreprises engrangent les profits, les truands aussi. Ruben, Prev et Elias, trois petites frappes teigneuses habituées à des casses de petite envergure se voient proposer un gros coup par un ponte d'une Mafia quelconque. Le jeu en vaut-il la chandelle ?
Dans Les oiseaux de proie Jake Raynal (Francis) explore la nouvelle Europe du crime à la manière de Jean-Patrick Manchette. En effet, Cambrioleurs recèle en son sein tous les éléments clefs du roman noir. Des personnages à l'âme sombre se débattent dans une société montrée sous son aspect le plus brutal. Plus encore, tout ce petit monde suit une morale diffuse qui pourrait se résumer à « vaut mieux être du bon côté du canon ». Comme le genre l'exige, la narration est directe et truffée de références géopolitiques, plongeant ainsi le lecteur dans une réalité tangible que beaucoup préféreraient ignorer. Le résultat est un album passionnant, au rythme tendu et dérangeant par sa franchise. Attendez-vous à des coups fourrés, ne comptez pas sur la pitié pour vous en sortir, ici les faux-pas se payent cash !
La lourde ambiance dans laquelle baigne le scénario est renforcée par des dessins sombres et une approche graphique quelque peu radicale. Univers nocturne oblige, les planches sont baignées d'un noir dense et d'un bleu profond desquels se détachent de vagues silhouettes ondulantes et furtives. Des différents protagonistes ne ressort qu'à peine un détail vestimentaire ou une posture. Peu importe en fait, ils ne sont que des pions dans un jeu plus grand que nature. Les vrais héros sont les capitales et leurs anonymes immeubles de verre et d'acier. Les façades qui, hier, ont vu défiler des armées conquérantes, sont aujourd’hui, témoins des agissements d'ambitieux criminels d'un nouveau genre. Contrairement aux humains qui restent volontairement flous, Raynal a croqué ces cités avec précision. Ce contraste entre pierre et chair renforce encore plus l'atmosphère déshumanisée et âpre qui hante les rues des villes une fois le soleil couché.
Thriller noir, Cambrioleurs débute de la meilleure des manières : sans concession. À lire.
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