A
voir le compas de l’œil ! Une expression prise au pied de la lettre par cet inconnu qui gît devant le commissaire Clé, en ce premier jour du XXème siècle. Cet éminent policier du Quai des Orfèvres, rompu aux gymnastiques intellectuelles les plus périlleuses, féru de science et de philosophie, avait appris le meurtre peu auparavant de la bouche d’un visiteur britannique, ayant en sa possession une coupure de journal relatant ce spectaculaire assassinat. Journal ne devant paraitre que le lendemain, et pourtant retrouvé un mois plus tôt dans une poubelle d’un palace londonien…
Le mystère s’épaissit encore quand d’anciennes affaires similaires ressurgissent : le commissaire en est bientôt convaincu, un tueur en série remonte le temps, égrainant sur son passage les victimes lardées de seize coups de compas. S’appuyant sur le ressort classique du paradoxe temporel - comment empêcher un évènement de se produire dès lors qu’on l'ignore, et comment en avoir connaissance si on l’empêche de survenir -, le scénariste entraine le lecteur dans une étonnante enquête à travers le siècle, et au-delà, visant à supprimer le mal à la racine, quelque part dans un futur incertain.
Plus ludique que véritablement savante, bien que parfois immodérément emberlificotée, l’intrigue se suit avec un plaisir impatient, la narration flirtant habilement entre suspense et érudition, tout en maintenant un ton ironique et décalé. Cette dichotomie entre drame et légèreté est encore renforcée par l’étrange singularité du dessin. Le traitement infographique par larges aplats, sans crayonné ni encrage, lorgnant parfois vers l’illustration enfantine par son côté naïf, ne peut que détonner avec le propos plutôt mature du sujet et les (quelques) scènes violentes émaillant ce premier opus des Aventures extraordinaires d’Ambroise Clé. Mais la véritable force de ce livre réside dans son illustration : à défaut d’un pinceau virtuose, Sylvain Dorange fait montre d’un époustouflant sens de la composition. De la réalisation des cases à la construction des planches, l’auteur révèle un talent narratif redoutablement efficace, inventif, esthétique, percutant… Une raison impérieuse de s’attarder sur cet album.
Malgré quelques faiblesses scénaristiques et un premier abord qui peut dérouter, ces Promeneurs du temps entrainent le lecteur vers de réjouissantes acrobaties conceptuelles doublées d’une enquête policière chimérique et singulière, le tout servi par une mise en images aussi étonnante que captivante. Une belle réussite pour Poivre & Sel, toute jeune maison d’édition belge.
Le graphisme de cette bd n'était pas celui qui m'attirait le plus. Pour autant, le titre avait quelque chose d'intrigant. Il est vrai que la question des voyages dans le temps retient incontestablement mon attention. Il y a eu tellement de théories à ce sujet à commencer par celle d'Albert Einstein qui laissait entrevoir une telle possibilité. Dernièrement, des scientifiques chinois avaient affirmés qu'il était manifestement impossible de voyager dans le temps. Qui a raison ?
Cette œuvre est réalisée par un illustrateur strasbourgeois issu de la fameuse école des Arts décoratifs qui a vu éclore pas mal d'artistes ces dernières années. L'auteur a choisi l'angle d'une enquête policière par rapport à un meurtre assez sordide commit à l'aide d'un compas. Quoi de plus mystérieux pour commencer ! Les difficultés vont aller en s'accroissant.
Pourtant, j'avoue ne rien avoir compris à ce récit qui proposait pourtant une solution à ce paradoxe scientifique et temporel d'où ma relative déception. Je n'aime pas rester sur ma faim.
Cette série possède un charme indéniable qui opère instantanément sur le lecteur. Son dessin rond et sans encrage, l'harmonie sucrée des couleurs, le décalage fantaisiste de l'intrigue et ses petites ambiances rétro-futuristes forment un savoureux cocktail. Le tout relevé d'une subtile petite pointe de cynisme. A découvrir, vraiment.