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ntre 1999 et 2010, un photographe-reporter sillonne l’Europe au volant de la vieille Skoda de son père. Armé de ses appareils photo, il a les parias de l’Europe dans sa ligne de mire, mais n’est malheureusement pas le seul à les viser. Pourchassés par les kosovars albanais, montrés du doigt par les néonazis en République Tchèque, entassés dans des bidonvilles aussi illégaux qu’insalubres et stigmatisés par le gouvernement de Nicolas Sarkozy, voilà le quotidien des Roms… l’histoire de l’Europe d’aujourd’hui. Alain Keler témoigne !
Initialement publié, de l’automne 2009 à l’été 2010, sous forme de feuilleton dans les pages de l’excellente revue trimestrielle XXI, Des Nouvelles d’Alain paraît maintenant en album aux Éditions des Arènes. Cette bande dessinée reportage d’Emmanuel Guibert, Frédéric Lemercier et Alain Keler invite à suivre le périple européen de ce dernier, sur les traces de la plus grande minorité du continent. Parti à la rencontre des Roms pendant une décennie, il s’immisce dans le quotidien de ce peuple déraciné, discriminé, harcelé, en proie à la misère et à l'indifférence.
En s’appuyant sur les instantanés d'Alain Keler, Emmanuel Guibert (La guerre d’Alan, Le Photographe) dresse le portrait peu reluisant de laissés-pour-compte devenus indésirables. Des hauteurs de Pristina aux portes de Paris, avant de se faire rattraper par l’actualité dramatique de l’été 2010 lors de l’épilogue, les auteurs témoignent et constatent avec justesse, sans jamais tomber dans le larmoyant. À la recherche de moments de bonheur et de notes positives dans cet amas de paysages et visages désolés, ils s’attardent ainsi sur des enfants faisant la roue au milieu de déchets ou sur une fête rythmée par de la musique tsigane. Malgré un sujet qui invite moins au voyage que dans Le Photographe et d'autres petites imperfections, telles que l’absence de fil rouge au niveau de la narration ou un manque d’empathie qui est probablement dû au regard distancié d’un auteur approchant cette communauté avec une certaine retenue, cet éclairage humain et parfaitement documenté ne peut pas laisser indifférent.
À l’instar de la trilogie consacrée aux images du regretté Didier Lefèvre, cet ouvrage mêle à nouveau photographies, dessins et écriture. Le traitement visuel étant assez proche de ce qui a été fait dans Le Photographe, il ne réserve certes que peu de surprises, mais demeure cependant d’une qualité remarquable. Si les dessins servent principalement de liant entre les différentes scènes et s’effacent très souvent au profit du récit, certains passages permettent cependant de le mettre en avant, comme lors de cette danse parsemée de couleurs, sur les airs endiablés de Kesaj Tchavé. La véritable force graphique se situe évidemment au niveau des images capturées par Alain Keler, car celles-ci permettent de partager des moments qu’il serait impossible de dessiner ou de narrer. Au milieu des paparazzi et des photographes de mariages il y a en effet LE photographe, celui qui n’hésite pas à prendre des risques pour nous montrer l’envers du décor. Des hommes et des femmes qui décident d’associer leur passion pour la photographie à la noble cause. Des aventuriers dont Niépce et Daguerre seraient assurément fiers.
Tout comme Le Photographe ou Gaza 1956, cette entreprise journalistique exploite parfaitement les possibilités du neuvième art, tout en lui faisant grand honneur.
Avez-vous des nouvelles d'Alain ? Je pensais naïvement que c'était un otage. Mais non, c'est un reporter photographe passionné par les roms. Il arpente toute l'Europe depuis une décennie à l'afflux de la moindre photo pour décrire leur situation précaire.
C'est un peu le genre de discours de bobos qui déclare que les expulsions ne sont pas une solution car elles cassent brutalement les soins et la scolarité en favorisant les épidémies et les trafics en tout genre tout en ruinant l'avenir des enfants. Bref, les expulsions ne règlent pas le problème, elles l'amplifient et le perpétuent. C'est écrit noir sur blanc dans cette oeuvre. Je n'invente rien.
Alors, ouvrons nos frontières allègrement à l'ensemble des roms de la planète car il n'y a jamais assez et c'est le paradis chez nous ! Un tel discours ne peut que favoriser les thèses les plus extrémistes et nous mener tout droit un jour à la guerre civile. Je pense que la saturation et l'exaspération des plus modérés est proche et qu'il convient de ne pas souffler sur les braises. Dans un monde parfait, c'est un beau discours auquel je souscrirais volontiers; j'ai dit dans un monde parfait...
Cette bd mélange la photographie avec des planches pour nous délivrer un témoignage de la misère humaine subi par ces roms européens. Certes, l'auteur évite le voyeurisme (encore que car il s'est tout de même payé une fracture en essayant d'éviter un rom subitement en colère à cause d'un cliché).