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n apprenant qu’il passera ses vacances d’été en Normandie chez des grands-parents qu’il ne connaît même pas, Jean-Loup est plutôt dépité. Accueilli par la neige et le blizzard, Jean-Loup se rend compte que son séjour normand ne sera pas comme les autres. Impression confirmée lorsqu’il découvre que mamie Toussaint parle aux arbres et que son papi a quelque chose de bien mystérieux. Mieux, il ne tarde pas de faire la connaissance de Rosanne avec laquelle il passe d’agréables moments dans la forêt proche de la maison de ses aïeux, sans s’inquiéter des rumeurs sur la présence d’un loup. Jusqu’à ce qu’un chasseur peu amène l’interroge et place des pièges pour capturer la bête…
Parler des racines et de la filiation, comment mieux le faire que par le biais d’un conte ? C’est en tout cas l’exercice auquel se soumet Benoît Frébourg (dessinateur des Carnets de Gerog Weiss) dans Jean-Loup. Dès la première page, évoquant la légende de la « maison dans l’ombre », l’auteur donne le ton. Celui d’un récit à la narration calme et fluide, teinté d’un zeste d’étrange et saupoudré d’humour léger, qui pose rapidement le décor et l’ombre sinistre d’un méchant qui ne croit en rien ni personne d’autre qu’en lui-même.
La bâtisse et le nemrod sournois ont leur importance, bien que celle-ci ne se dévoile que lentement au fil de l’histoire, par petites touches consistant ici en une interrogation, là en une silhouette fugace, ailleurs en un rictus carnassier ou en un œil soudain plus brillant. Le reste est consacré à la découverte. Jean-Loup apprend à connaître ses grands-parents et leurs petites manies, à apprécier leur art de vivre, à explorer la nature qui l’environne, à communiquer avec le vivant, à laisser germer en lui les premiers bourgeons d’un amour enfantin, à discerner sa vraie nature. Cette dernière ne lui est révélée qu’à demi-mots, pourtant elle apparaît toujours plus clairement au lecteur – et spectateur – qui peut, alors, mieux savourer et goûter à toute la subtilité dont fait preuve Benoît Frébourg pour transmettre l’idée de l’hérédité, de la transmission de certains caractères par le petit miracle de la génération.
Portant cette fable poétique et délicate, le dessin, relativement simple et quelquefois brouillon, rappelle un peu celui d’un Sfar ou d’un Quentin Blake (si on évoque l’illustration jeunesse). Enrichi par une mise en couleurs harmonieuse, il offre quelques planches délicieusement lumineuses, d’autres plus sombres et inquiétantes, mais toujours en parfaite adéquation avec un propos toujours légèrement amusé ou décalé.
Rappelant par certains côté les romans de Roald Dahl, Jean-Loup constitue un agréable contre propre à plaire à tous, petits et grands.
Jean-Loup est un gentil conte enfantin sur la vie à la campagne en Normandie, où l'on peut encore rencontrer des loups. A ce qu'on sait, le dernier a été tué en 1911 mais les légendes ont la vie dure. Là, c'est plutôt le mythe du loup-garou qui va prendre le pas. On aura au moins la signification profonde du prénom Jean-Loup.
J'avoue avoir eu un peu de mal avec ce graphisme moderne mais un peu hachuré, qui ressemble au travail de Joann Sfar.
Au final, une œuvre qui emprunte la magie et un peu de poésie, qui peut séduire un large lectorat (je parle notamment des parents qui liront ce conte à leurs enfants).