C
omme l’indique avec humour le titre, « L’animation japonaise, du rouleau peint aux Pokemon » se propose de dresser un panorama complet de l’histoire de l’animation au pays du soleil levant tout en démontrant que le choc iconographique n’est que le fruit d’une longue tradition à laquelle chaque innovation technologique va non seulement apporter sa pierre mais aussi, par ses contraintes, induire de subtiles mutations de la représentation picturale. Nombreux sont ceux parmi les mangakas et producteurs interviewés qui pensent que les rouleaux peints et les estampes font parti de leur ADN culturel.
La partie historique du livre est passionnante à plus d’un titre, abondamment illustrée de rouleaux du XVIIe siècle (véritables précurseurs des mangas), d’estampes, de nombreux appareils et jeux optiques (lanternes magiques, thaumatropes, zootropes, phénakistiscopes et autres praxinoscopes du même acabit), souvent importés d’Europe par l'entremise de la Chine ou de la Hollande lorsque l’île s’était coupée du monde. Un long cheminement qui témoigne de l’obsession des artistes japonais pour donner à leurs peintures ou à leurs récits l’illusion du mouvement et du temps qui passe, et ce jusqu’aux tâtonnements et prémices de l’animation au début du XXe siècle.
Suit le plus important chapitre de l'ouvrage sur l’histoire des grandes maisons de production dans lequelles bien évidement Ozamu Tezuka tient une place prépondérante. Brigitte Koyama Richard évite l’écueil d’un laborieux catalogue en émaillant son propos de très nombreuses interviews, la quasi-totalité des grands studios lui ayant ouvert leurs portes et leurs hauts responsables lui ayant volontiers accordé des entretiens. C’est aussi à travers eux que l’on perçoit l’importance d’Ozamu Tezuka sur ce pan entier de l’industrie et de la culture japonaise de par sa production proprement ahurissante (jusqu'à six cents pages par mois) et ses perpétuelles expérimentations et innovations.
On regrettera avec l’auteur l’attitude du studio Ghibli qui ne lui céda aucun droit de reproduction et nous priva d’un entretien avec Hayao Miyazaki qui est sans doute, depuis Ozamu Tezuka, l’un des plus importants réalisateurs de dessins animés japonais.
Le livre se referme sur un parallèle avec les films d’animations de marionnettes, directement issus de l’ancestrale tradition du Bunraku (théâtre de marionnettes), auquel on aurait peut être préféré une incursion sur l’interdépendance de plus en plus prégnante entre l’animation et les jeux vidéos.
Au final « L’animation japonaise, du rouleau peint aux Pokemon » atteint son double objectif de pédagogie et d’illustration et intéressera les passionnés non seulement d’animation mais aussi de manga ou d’histoire de l’art tout simplement. Un complément indispensable aux possesseurs du "Manga" de Paul Gravet.
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