S
ur la canopée, Darianna, accompagnée du terrible Shark, cherche la trace du « Poséidon » et de ses passagers qui pourraient bien les mener jusqu’à Hélénia et aux rebelles qui l’ont kidnappée. A quelque distance, Tania et Jasper tentent de retrouver leur ami Jon et la princesse mais découvrent vite qu’ils ont sombré sous le tapis de feuilles en même temps que le vaisseau. Repérés par les agents impériaux, les adolescents se précipitent dans le trou béant laissé par le « Poséidon » et s’enfoncent dans l’inconnu. Arrivés au pied des arbres gigantesques de la planète, ils rejoignent Jon, Hélénia et l’équipage du navire, avant d’être rattrapés par Darianna et son chaperon. Ensemble, ils découvrent alors des profondeurs sombres, peuplées d’étranges créatures, ainsi qu’une bibliothèque qui leur révèle l’origine inattendue d’Okheania…
L’exploration du monde végétal imaginé par Eric Corbeyran (Weëna, Le Chant des Stryges, La conjuration d'Opale, Guarrigue etc.) se poursuit en son cœur même. Les racines – à plus d’un titre – dévoilent leurs secrets bien gardés et confèrent à la fable écologique et humaine une nouvelle dimension. Grâce à une habile mise en abîme qui lève le voile sur la genèse d’Okheania, la réalité politico-sociale d’un univers stratifié et inégal prend tout son sens, tandis que l’aspect environnemental gagne encore de l’ampleur. Les réactions disparates des protagonistes – certains sont ébranlés, comme le capitaine du « Poséidon », d’autres, surtout Shark, nient en bloc – après cette révélation montrent suffisamment combien il est difficile de se détacher de ce qu’on a toujours cru. Par ailleurs, les caractères ainsi que les relations entre les personnages sont développés. Ainsi, la jalousie de Jon s’exprime-t-elle de plus en plus, alors que Darianna paraît de moins en moins antipathique. Le récit est toujours bien rythmé et alterne les passages débordant d’action avec des pauses propices à la réflexion ou aux découvertes, ce qui maintient l’attention et la curiosité tout au long de l’album.
Au dessin, Alice Picard (Weëna, Mon chat à moi, Les véritables Légendes urbaines - tome 2) s’ingénie avec talent à peindre un sol spongieux, envahi par la mousse et les champignons, où se dressent les vestiges de statues et de monuments fantomatiques rongés par l’humidité et les moisissures. Plongés dans des ténèbres percées par des microcosmes phosphorescents, ces tréfonds font curieusement contraste avec l’étendue steppique du tapis de feuilles en surface. Sa bande dessinée dans la BD est, quant à elle, dans un style graphique simplifié, plus caricatural, et se pare d’agréables teintes sépia. Le changement de technique opéré par la dessinatrice qui ajoute désormais un léger lavis sur certains détails, permet un rendu moins chargé et moins saturé de la mise en couleurs toujours assurée par Elsa Brants (Weëna, Les Chroniques de Magon, Le Déserteur, Les Brumes d'Asceltis). Cette dernière joue sur les teintes vertes sombres et bleues, un peu fluorescentes, pour rendre au mieux le terrain presque putride du fond et fait exploser la lumière dans les quelques scènes au-dessus de la canopée, créant ainsi des atmosphères particulières très réussies.
Le troisième tome d’Okheania confirme, s’il en était encore besoin, l’intérêt d’un scénario bien mené, de même que la richesse d’un univers complexe et attirant, encore sublimé par un graphisme maîtrisé. Aucun doute que les jeunes y trouveront leur compte et que les plus grands pourront aussi se laisser séduire.
>>> Lire la chronique du tome 1 d'Okheania
>>> Lire la chronique du tome 2
Ce troisième album est tout aussi réussi que les deux premiers.
L'histoire avance petit à petit et suit son train train.
Le dessin est toujours très agréable, hate aussi d'un autre weena.
Vive la suite.