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yant répondu positivement à une annonce pour un emploi de gouvernante auprès de deux orphelins délaissés par leur oncle, Miss Griffin rejoint le domaine de Bly, une vaste propriété isolée dans la campagne anglaise. La jeune femme est cependant victime d’étranges apparitions, dont celle d’un ancien valet nommé Peter Quint. Outre les silhouettes effrayantes, c’est également le comportement de plus en plus suspect des enfants qui l’inquiète.
Salué entre autres par Oscar Wilde, Le Tour d'écrou d’Henry James est considéré comme une référence en matière de récits fantastiques. Déjà transposé à l’opéra et au cinéma, ce roman paru pour la première fois en 1898 a maintenant dégoté une place au sein de cette collection Ex-Libris de Delcourt qui a pour ambition d'adapter de grands classiques de la littérature.
La couverture donne immédiatement le ton, du regard ambigu des enfants à l’atmosphère angoissante dégagée par le manoir au loin, en passant par cette personne qui se dirige inéluctablement vers ce lieu qui n’inspire rien de bon. En guise de prologue à la lecture du journal de la gouvernante, le narrateur installe une ambiance «coin du feu» qui attise habilement la curiosité de son audience. Arrivé dans le vif du sujet, l’histoire de Miss Griffin va continuellement s’amuser à faire douter le lecteur, non quant à sa qualité, mais concernant la manière d’interpréter les faits qui s’y déroulent. Prolongeant cette incertitude au-delà de la dernière planche, Hervé Duphot abandonne finalement le bédéphile dans une position bien inconfortable, le cul entre deux chaises. Jouant la carte du surnaturel tout en laissant la porte ouverte à une explication plus cartésienne, l’auteur fait également monter le suspense au fil des pages. Chaque fait étrange (spectres, bruits, comportements douteux) augmente la pression psychologique à laquelle est exposée la jeune femme, illustrée par la métaphore de cet appareil de torture moyenâgeux qui à chaque tour d’écrou augmente la douleur de sa victime.
Graphiquement, le style classique d’Hervé Duphot (Hanté, avec Christophe Bec) sied assez bien à l’esprit du récit et fait parfaitement ressortir l’ambiance victorienne de l’époque. Le manque de caractère de la mise en images empêche cependant le dessin de se mettre au diapason de l'intensité du scénario.
Au final, ce one-shot très prenant fait ressortir les qualités de l’œuvre originelle, sans pour autant proposer un graphisme susceptible de lui conférer une dimension supplémentaire.
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