A
vec une vague de suicides inexpliqués dans un lycée, des personnages ordinaires pourtant dotés de pouvoirs hors du commun – chacun, à sa manière, peut affecter la trame du temps – et autant de présences fantomatiques, Kang Full renoue avec les ingrédients qui ont fait sa renommée. Délaissant les rivages du conte intimiste (L’idiot), l’auteur coréen retrouve la veine fantastique de L’appartement et son goût pour le suspense et l’angoisse.
Timing se présente ainsi comme un thriller puisant aux sources du surnaturel et de la parapsychologie. Le scénario est convenu mais plaisant, la construction souvent habile et rythmée. Afin de retranscrire au plus près les particularités et les sentiments de ses personnages, Kang Full multiplie les flashbacks, varie les angles et les points de vue, revient sur telle ou telle scène pour mieux en souligner l’importance ou le détail qui aura échappé à la sagacité du lecteur. Malheureusement, la répétition du procédé peut parfois agacer et ses vertus pédagogiques confinent à la redondance. La tension progressivement distillée s’étiole au gré de ces allers-retours incessants dans le passé quand bien même la nature des pouvoirs des principaux protagonistes pourrait le justifier tout comme le fait qu’il s’agisse d’un tome d’introduction… Reste l’impression persistante de s’être gentiment fait balader sur près 290 pages sans que l’on en sache beaucoup plus sur une intrigue supposée se conclure en trois tomes.
A la complexité (relative) de la narration répond la (relative) simplicité du dessin. Bien loin d’affadir le propos, le trait, épuré, hésitant et particulièrement naïf de l’auteur, nourri au dessin de presse, facilite l’identification et l’expression des émotions. Le découpage, le sens de la composition semblent très influencés par les techniques de publication en ligne et l’on sait par ailleurs le succès que rencontre le blog de l’artiste en Corée. Les planches font le plus souvent l’économie du cadre quand les pages se divisent en deux bandeaux, séparés d’un pointillé, se parcourant verticalement. Beaucoup seront cependant rebutés par ce qui s'avère finalement une agréable surprise.
Construction originale, pitch efficace, Timing s’annonce, une fois les quelques réserves mises de côté, plein de promesses. Encore faudra-t-il les tenir... et dans les temps.
>>> Lire les chroniques de L’idiot (tomes 1 et 2).
>>> Lire aussi la chronique de L’appartement.
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