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epuis maintenant deux albums, Le Choucas a abandonné le petit format de ses débuts et ne vit plus de simples aventures mais des tribulations. Beaucoup de bruit pour pas grand chose ? Pas forcément, car il y a bien une différence de ton qui accompagne ce changement de forme.
Les enquêtes de ce détective privé, volontaire mais pas forcément infaillible, et c'est un euphémisme, bénéficient désormais de plus grands espaces, où Lax balade son héros fétiche. L'occasion pour lui de rappeler à tout un chacun qu'il est bien l'un des plus grands dessinateurs actuels, tant les paysages africains de ce nouveau volume, baignant dans des couleurs chaudes et lumineuses, sont exceptionnels. Est-ce que cela suffit à faire un bon album ? Pas vraiment, car cette belle représentation graphique se fait au détriment de l'ambiance sombre et confinée qui faisait la marque et surtout la qualité des six premiers tomes. C'est toute la filiation par rapport à la Série Noire, dont les allusions paraissent dès lors incongrues, qui disparaît. Nul doute que le personnage aura perdu en caractère ce qu'il aura gagné en force d'exposition.
Qui plus est, l'enquête qui pousse Le Choucas sur les terres maliennes manque décidément de sel : des rebondissements moins bien amenés, des dialogues qui n'ont plus la saveur d'antan et un intérêt qui s'émousse au fil des pages font de cette nouvelle aventure l'une des moins passionnantes. Le propos s'apparente en effet à une charge contre certaines pratiques condamnables de la police nationale française à l'encontre de la population d'origine étrangère. Si l'on peut comprendre qu'un auteur pointe du doigt une réalité qu'il juge inacceptable, il est regrettable que cette dénonciation ne serve pas de cadre à un récit mieux construit. A rendre ses intentions trop évidentes, l'auteur se tire une balle dans le pied et c'est l'album dans son ensemble qui prend des airs de simple prétexte.
Il est à espérer que Le Choucas ne suive pas la voie d'un canard de ses collègues dont la série, tout bonnement géniale à ses débuts, n'est plus digne aujourd'hui du moindre intérêt. On n'en est pas là, heureusement, mais le prochain album devra être nettement supérieur pour démentir l'impression de trop peu qui s'impose une fois la dernière page tournée.
Comme Gabin, un des héros ancien champion d'Afrique de boxe, Lax tape fort où ça fait mal. A lire donc, absolument...
Anibara M. Lacroix.
Le Choucas est engagé par un couple pour retrouver leur fils disparu depuis peu. Un petit détail, le garçon est d'origine malienne et une ambiance malsaine règne sur la ville car des "incidents" racistes se sont multipliés ces derniers temps. Fugue, kidnapping ou bavure ? Le Choucas, flanqué de Gabin le fidèle taximan, enquête et suivant une piste se retrouve au Mali ou les choses sont plus compliquées qu'elles ne paraissent.
J'ai été un peu déçu par cette histoire, qui sur un fond d'actualité très intéressant (racisme, rapport pays pauvre/pays riche), s'enlise un peu dans la latérite. Les divers éléments du récit se suivent d'une façon un peu forcée rendant la narration quelque peu chaotique. Les tenants et les aboutissants de l'intrigue à peine posé qu'on se retrouve en Afrique sans trop savoir comment, une poursuite mouvementée sur la piste arrive et la conclusion abrupte et fleur bleue clôt l'histoire. Le propos de Lax mériterait au moins deux volumes pour s'épanouir, ici il y a trop d'éléments, d'explications, pour permettre vraiment au récit la chance de se développer.
Graphiquement c'est très bon (comme d'habitude avec Lax), Lax a parfaitement su rendre la riche lumière africaine. La chaleur, la poussière et la transpiration des pistes assomment les hommes. Et pire que ça, avec la température la bière est tiède...
Après le Choucas en Amérique (tome 6) et Le Choucas au Tibet (tome précédent), ce Choucas au Congo me semble être celui de trop. Lax dans une interview récente (Bodoi 118) dit qu'il a l'impression d'avoir fait le tour du personnage, on ne peut que lui donner raison. De plus, déraciné de sa ville, le Choucas n'est vraiment pas à son aise. Alors plutôt qu'un Cigare des Pharaon, un Les gauloises du président serait plus de mise.