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u haut d’un H.L.M. de la cité des Hauts Vents, un adolescent, le visage grimé aux couleurs de la tristesse, entame au violon une marche funèbre suspendu au-dessus du vide. Dernier hommage à Clock, le clown tué lors d’un début d’émeute, celui-là même qui avait redonné un semblant de sens à sa vie.
« Le monde est violent
Je vis dans la peur
Le noir, les horreurs
Je ne sais pas vivre
Et je saute dans le vide » (1)
Du haut d’un H.L.M. de la cité des Hauts Vents, une corde est tendue, un adolescent à son bout pendu.
Sur le bitume, ce qui s’apparente aux représentants de l’état et des religions tire les ficelles de ce funeste spectacle. S’ils semblent connaître les tenants, en maîtrisent-ils seulement les aboutissants ?
Rideau sur le premier acte. Le second, qui porte en couverture la protection symbolique d’une khamsa qui interpelle le regard, s’ouvre et offre une allégorie intéressante sur la place d’une cité dans le monde qui l’entoure, son isolement et ses frontières tacites. A double tranchant, cependant, car le rendu réaliste en prend un coup et ce ne sera pas la seule fois. Dommage pour un récit qui, au-delà de l’aspect thriller, s’attache à la dimension sociale et nécessite donc une gestion minutieuse des détails. Ce chapitre souffre de sa position centrale entre une ouverture qui, en plus d'être une réussite, provoque chez le lecteur de légitimes attentes et un final qui lui seul pourra les satisfaire. La question se pose alors sur le découpage de l’histoire en trois rounds, là où deux eurent peut-être constitué un choix plus pertinent. Caprice de lecteur ? Quoi qu’il en soit, cet album se retrouve en position intermédiaire dans l’orchestration d’un puzzle des plus complexes. L’usage amorcé dans le premier tome de sauts dans le temps et l’espace s’accentue. La volonté de donner à ces changements de contexte un lien graphique, par souci sans doute trop marqué d’esthétisme, n’est pas étrangère à cette dérive. Si ce parti-pris a le mérite d'inviter à une lecture des plus attentives, il peut aussi la rendre un brin laborieuse. De quoi en décontenancer plus d’un...
Alors, que reste-t-il ? Tout d’abord l’espoir placé dans le tout que constituera à terme Le sourire du clown. Les derniers scénarii proposés par Luc Brunschwig, plus porté vers la qualité que vers la quantité, plaide en ce sens. Cette série porte en son sein un réel potentiel. Tout d’abord, un panel de protagonistes aux personnalités très fouillées, des plus simples aux plus inquiétantes, où aucun ne parait être là de manière incongrue. Cet album de transition a permis de s’attarder sur chacun d'entre eux et de préciser les liens qui les unissent. A cet effet, le dessin en couleurs directes de Laurent Hirn est tout simplement saisissant, les émotions qui traversent les personnages étant d’un rendu remarquable qui contribue tout particulièrement à leur donner vie. Il est d’ailleurs étonnant que l’usage de tons pastel n’atténue en rien cette impression, lorsque ce sont la colère et la haine qui submergent par instants les acteurs de ce drame. Mise en parallèle, l’absence d’expressivité du prêtre (réelle ?) et du jeune clown (apparente ?) n’en est que plus déroutante. C’est aussi avec talent qu’il donne une justesse au décor sur lequel est plantée l’intrigue, sujet ô combien d’actualité, à juste titre ou non. Les ensembles bétonnés, peut-être un soupçon trop aseptisés, font concurrence, en terme de froideur, au manteau de neige qui recouvre le quartier. Apparence ? Les dernières planches ne laissent que peu de doutes quant à la violence du dénouement. Reste à voir quelle forme elle prendra.
Tout le paradoxe de cet album, placé en relais au service de la série, repose sur une imbrication des événements peu évidente de prime abord, parfois maladroite, mais laissant cependant poindre la possibilité d’une construction logiquement dévouée à cette explosion finale.
(1) extrait de Noir les horreurs des Béruriers noir.
- Chronique du T.1 : Le sourire du clown
Déçu par ce deuxième album.
Une description trop caricatural des banlieux, un scénario un peu poussif, des dessins vraiment pas à la hauteur.
Même les personnages que l'on pouvait trouver originaux sombrent dans le banal.
Espérons que le tome 3 apporte plus de souffle à cette série.
6/10.
J'ai lu hier soir les 2 tomes coup sur coup, et mon sentiment est assez particulier.
Tout d'abord, il est important de noter que les BD sont de qualités. (couverture, papier). L'éditeur a fait un effort, remerçions-le (même si on le paie !!)
Ensuite, le scénario, les dessins, les couleurs..... On plonge dans cette histoire immédiatement. Page 2....Gorko......ca y est c'est lancé !!!
Aucune solution miracle n'est à attendre de ce second tome. L'enfance est pourchassée sans relache, l'ordre établi se doit de trouver à tout un responsable à nos propres angoisses. Djin a perdu le goût du rire et de la parole mais il illumine les planches par sa présence car il est le centre de toutes nos attentions et de tous nos espoirs. Ce deuxième volume allie subtilement présent et passé afin de nous donner un éclairage sur les évènements qui y puisent leurs racines. Si ce volume termine l'histoire, tout se dénoue sans apporter de réponses à nos questions et c'est toute la force de ce dyptique. Dans le cas où un troisième volume devrait suivre le récit pourrait y perdre de son impact... En attendant chapeau bas aux auteurs pour ce second acte !