D
ans une époque - qu’on espère pas si – proche, le port du masque à gaz est une évidence. Les nuages de fumées nocives, les rejets visqueux de tous genres, les déchets toxiques, en quantités dispersées ou non, font désormais partie du décor. Au point qu’on ne les remarque plus. Foutue époque, planète foutue ? Mieux vaut en rire… de peur d’avoir à en pleurer.
Il est des albums qui ont leur bande originale. Une musique, une chanson colle aux images et au texte. Ici c’est évidemment le manifeste "Respire" de Mickey 3D qui résonne à la découverte des premières planches. Sauf que le "tu vas pas mourir de rire…" original, David Ratte aimerait bien le prendre à contre-pied et filer la banane au lecteur (non transgénique la banane si possible, mais ce sera peut-être évoqué dans un prochain volet). C’est tragique mais on peut rire de tout, la preuve en est encore faite. Avec ces gags, l’auteur dénonce un laisser-aller et un laisser-faire dont ses personnages n’ont pas conscience. C’est comme ça, ils sont habitués : à porter ce masque (modèle unique pour tous), à vivre sans verdure, à prendre les souvenirs de nature des anciens pour des signes de sénilité. A ne plus pouvoir se perdre dans le regard de sa dulcinée. A la confondre même avec la première silhouette venue. Sortez vos mouchoirs, nouez la corde pour vous pendre ou fignolez vos pancartes pour rappeler l’urgence de la situation à la face du monde. A vous de voir.
Mais dans un premier temps, marrez-vous ! Car il est drôle cet album. Les dessins sont vivants, les tons des couleurs tout à fait appropriés et les scènes percutantes. Le comique de répétition sait se faire léger et l’enchaînement de courtes scènes autour d’un même thème se fait avec fluidité. Même les bas de pages, qu’on avait pu confondre avec un bête remplissage mais qui finissent par constituer une animation plaisante, contribuent à doter une Idée noire d’un sourire. Enfin, on sait gré à l’auteur d’offrir au lecteur attentif des créatures féminines aux formes attrayantes plutôt que des mutants femelles aux contours approximatifs. C’est un détail, quoique.
A mille lieues du brûlot militant auquel on ne prête pas attention tant sa forme est trop austère pour susciter l’envie de le consulter ou son verbe trop haut pour l'écouter sereinement, Milieu naturel atteint son but. Et donne une furieuse envie de battre la campagne (rien à voir avec des pulsions de maltraitance qu'on se rassure). Pour, par exemple, grimper dans un « végétal antique poussant aléatoirement dans des zones appelées forêts ».
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