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ong Kong, années 80. Tao Tigrou, une dizaine d’années, est un enfant un peu turbulent et pas trop studieux, mais doté d’une imagination débridée. Sa lubie est de porter un masque de chat (qu’il a fait lui-même) et de se poser en super-héros félin ! Ses instituteurs et sa mère font mine d’accepter : si ça peut le faire tenir tranquille, c’est déjà ça de gagné. Quant à ses copains, ils adorent et sont tous un peu jaloux devant l’audace et le sens de la répartie de leur coreligionnaire. Là, l’heure est grave, les bulletins de notes sont tombés et celui de Tao n’est pas fameux. En plus, il l’égare sur le chemin de la maison. Un passant l’aurait récupéré et serait entré dans Kowloon, le pire quartier de la ville. Pas tergiversation possible, il va devoir pénétrer ce dédale de ruelles mal famées…
Un personnage principal ruant dans les brancards, des péripéties farfelues et, en bonus, une visite gratuite d’une banlieue mythique de la Perle de l’Orient, Linus Liu propose un album qui va à cent à l’heure. Ce qui ne serait qu’un classique récit jeunesse mettant l’emphase sur les bonnes manières et la politesse est dynamité par l’énergie contagieuse d’un petit gars cent pour cent positif. Oui, il fait des bêtises, commet des imprudences et n’écoute pas beaucoup sa mère. Seulement, il s’agit d’un super-héros à qui il ne peut rien arriver ! Rempli d’une confiance totale, Tao s’engage dans une course folle à travers les bas-fonds. En route, il trouvera des alliés également masqués et devra faire face à toutes sortes de truands aux intentions louches. Les dangers existent pour de bon, il ne s’agit pas d’une histoire simplette. Entre réalisme et conte moral, le scénariste a trouvé le parfait équilibre. Résultat, le lecteur s’amuse énormément et tremble aussi pas mal en compagnie de ce sale gamin tellement sympathique.
Changer de focale et de hauteur afin de se faire rencontrer et confronter l’enfance à la dure réalité du monde, sans être aussi radical qu’Amer Béton, Catmask Boy fait immédiatement penser au chef-d’œuvre de Taiyou Matsumoto. Même si le Japon fantasmé de l’auteur de Sunny est très différent du Hong Kong d’avant la rétrocession, les points d’achoppements sont nombreux, avec un peu plus d’innocence pour Liu. C’est peut-être là que réside la grande différence entre les deux titres. La citadelle de Kowloon a beau avoir été démolie et ne plus exister aujourd'hui, la fable de Catmask Boy s’avère très incarnée du fait de son côté témoignage historique et, surtout, grâce à une distribution solide et parfaitement caractérisée.
Jolie découverte aussi bien exécutée narrativement que visuellement, Catmask Boy devrait rallier autant les amateurs de super-héros décalés que ceux de manhua social humoristique.
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