C
larendon, Texas, 1893. Ici, le Capitaine et le Colonel sont les maîtres, depuis toujours. Ont-ils seulement été militaires ? Personne ne le sait. Ils règnent sur la ville (un village, il ne faut pas exagérer), leur ranch employant la majorité des habitants. Là, ils s’occupent d’enterrer Maggie, une femme de mauvaise vie dont la communauté ne veut pas dans le cimetière. Un sale boulot, d’autant plus qu’elle a été assassinée. Ça pourrait attirer des curieux et, peut-être, des ennuis. Déjà, il va falloir annoncer la nouvelle à son fils Billy. Pour le coupable, il sera toujours possible d’en trouver un, demain ou après. L’important, c’est que cet incident ne fasse pas de vague.
Drame psychologique classique raconté sous la forme d’un western crépusculaire, Billy Lavigne arrive deux ans après La femme à l’étoile. Le genre est à la mode et permet à Anthony Pastor de proposer un récit âpre et tendu où la poudre, si elle est bien présente, n’est que l’ultime outil d’une lutte pour la vérité et le respect. À une autre époque, le scénario aurait pu de se dérouler sur une île grecque, avec des acteurs en toge et des dieux à l’arrière-plan. Plus près de nous, c’est au théâtre sur la Rive Gauche ou au cinéma, avec Marlon Brando et Vivien Leigh en tête d’affiche, qu’il aurait pu être monté. C’est d’ailleurs là que le bât blesse un peu.
En effet, l’histoire est parfaitement construite, les personnages très bien écrits et dotés de psychologies complexes, travaillées jusqu’à l’extrême. La progression dramatique est également impeccable, quoique sans grande surprise au final. Une question se pose néanmoins : pourquoi le choix de l’Ouest américain, à cette période spécifiquement ? Si les grands espaces sont présents sous la forme de belles planches très visuelles, quels rôles jouent-ils vraiment dans cet affrontement purement humain ? Sans être artificiel, voire opportuniste, il faut bien avouer que ce cadre et ces archétypes (le boss, le shérif, le croque-mort, etc.) ne se révèlent pas critiques ou cruciaux dans le déroulement des évènements. Pastor est le chef d’orchestre et le lecteur suit la partition tel qu’il l’a imaginé, dont acte. Cependant, un peu plus de connexion ou de résonance avec l’environnement auraient été les bienvenues et auraient certainement donné plus de profondeur à cette tragédie sur fond de soleil couchant.
Tous les ingrédients sont présents, là où ils sont attendus, la réalisation graphique est tenue, Billy Lavigne s’avère être une très bonne lecture, posée et sérieuse comme il se doit. Il ne lui manque juste qu’un petit soupçon de souffle épique (de poésie ? De folie ?) pour totalement remporter tous les suffrages.
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