L
a couverture choisie par Actes Sud résume parfaitement le contenu de ce recueil de dessins. Elle interpelle directement le lecteur sur la guerre en cours à Gaza.
Chaque jour, Mazen Kerbaj est assailli de publications terribles sur les réseaux sociaux. Elles témoignent de la situation abominable à laquelle sont confrontés les Gazaouis. Face à des séquences de plus en plus insoutenables, il ressent le besoin de réagir avec ses armes : le dessin. À raison d'un publication par jour, il exprime sa peur, son dégout, son incompréhension face à une longue litanie de violences. Un mot s'impose à lui: génocide. Pourquoi l'Europe refuse-t-elle de le voir ?
L'intérêt de ce livre réside dans le fait qu'il reflète un point de vue différent de celui qui est généralement mis en avant dans nos médias. Les biais ne sont pas les mêmes. D'une certaine manière, ce recueil s'inscrit dans une démarche similaire à celle de Joe Sacco, qui assumait déjà, dans Palestine, de donner essentiellement la parole aux Palestiniens, afin de restaurer un équilibre des points de vue. Mais là où le journaliste proposait une enquête nourrie de témoignages récoltés sur le terrain, le caricaturiste propose des réactions à vif, marquées par l'urgence. Il énonce des slogans forts et compose des images d'une efficacité glaçante. Mais l'exercice atteint vite ses limites. L'auteur libanais semble parfois réagir à une déclaration précise, mais l'absence de contexte désamorce sa réponse ou la rend confuse.
Son propos se résume à une réponse purement émotionnelle, sans véritable réflexion. C'est oublier que le conflit à Gaza se joue aussi sur le plan médiatique et que les manipulations et la propagande jouent un grand rôle dans les deux camps. Cela le condamne parfois à une certaine naïveté. Cela dit, il ne tombe jamais dans la facilité et rappelle plusieurs fois que l'antisémitisme est une abjection, qu'il met au même niveau que l'islamophobie : celui du racisme. Il opère une distinction très claire avec l'antisionisme, qu'il revendique tout en insistant qu'il ne justifie aucune haine contre les Juifs. Surtout, il en appelle à la communauté internationale, la pressant de reconnaître qu'un crime contre l'Humanité se déroule maintenant, sous les caméras.
Ce recueil ne fera qu'apporter de l'eau au moulin des pro-palestiniens et hérissera le poil des défenseurs d'Israël. Par contre, il ne convaincra aucun indécis.
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