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usqu’à présent, le royaume quantique découvert dans l’éther il y a quelques années demeure une zone dangereuse. Pour d’évidentes raisons de sécurité, son accès est exclusivement géré par les militaires . Cependant, depuis qu’une base, une zone verte, a pu être construite sur Terminus (une des planètes de ce système), les autorités espèrent qu’une vraie relation puisse être établie avec ses habitants. C’est pourquoi, pour la première fois, une civile accompagne un détachement composé de la crème des Marines. Robin est journaliste, elle a pour tâche de documenter et raconter ces nouveaux territoires qui s’ouvrent devant l’humanité. Dix minutes après l’atterrissage, elle se retrouve seule, le reste de l’expédition a été balayée, massacrée. Commence alors le plus incroyable reportage de l’Histoire... si la jeune femme arrive à rester en vie suffisamment longtemps, évidemment.
Mini-série de science-fiction, Si vous lisez ça, je suis déjà morte... se lit comme un hommage aux classiques du genre. Plongée dans l’inconnue la plus totale, Robin va devoir tout apprendre (langue, religion, culture, politique, etc.) afin de se donner une chance de survivre. Matt Kindt est un connaisseur du domaine, il a imaginé un récit-monde global à la manière des grands anciens (Jack Kirby, Richard Corben, etc.). Société étrange, monstres bizarres et traditions baroques, les descriptions de la courageuse reporter font également penser aux meilleures créations de l’école franco-belge. Moebius, Mézières, Forest et Gillon viennent immédiatement à l’esprit.
Beaucoup d’influences, pas trop de substance ? Oui et non.
Tout d’abord, derrière le côté grand spectacle de l’âge d’or, le scénario se montre tout à fait actuel et résonne énormément avec notre époque. Une héroïne qui avoue son ignorance et préfère comprendre plutôt que de foncer dans le tas, ça fait toujours du bien. De plus, embrasser les différences n’est pas systématiquement synonyme d’abdication et Robin n’hésitera pas à jouer des poings/de la hache/du blaster pour sauver sa peau. En résumé, de l’action, oui, mais jamais gratuite.
Visuellement ensuite, le résultat est logiquement plus contrasté. Sans démériter, au jeu de la comparaison, Dan McDaid n'éclipse pas ses illustres prédécesseurs. Dit simplement, vue la nature de ce projet, il est impossible de ne pas mettre ses planches en vis-à-vis de celles du passé. Le trait du dessinateur s’avère néanmoins solide et particulièrement bien posé. Heureusement, McDaid n’est pas seul dans sa mission. Aux couleurs, Bill Crabtree offre un superbe travail tout en force et en nuance. Spécialement, l’habile et discret jeu de trames procure un rendu admirable à l’ambiance faussement rétro de cette entreprise d’aujourd’hui.
Dense, habité, parfaitement mis en place et en image, Si vous lisez ça, je suis déjà morte… ravira autant les spécialistes exigeants que les amateurs de thrillers spatiaux. Une jolie surprise très bien menée.
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