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es meurtres d’une violence inouïe secouent Bucarest. Messages envoyés par une mafia à une autre ? Maniaque à l’esprit dérangé en mission divine ? Assassinats sans réels rapports, mais se ressemblant étrangement ? C’est sur le bureau de l'inspecteur Marian Ferentari qu’est arrivé un de ces dossiers. «Règles-moi ça rapidement sans faire de vague et cesses de m’embêter avec tes états d’âmes !», telles sont les consignes que son commissaire lui a adressées. Les premières constatations font surgir des informations d’une nature inattendue chez la victime, un avocat reconnu et apparemment sans histoire. En effet, la brigade scientifique découvre une librairie informatique d’images osées et un studio de photographies high-tech. Tous ces indices suggèrent fortement une connexion avec les adeptes du cam-sex. Une descente dans les milieux interlopes s’impose. Ça ne devrait pas être trop difficile, Ferentari connaît ce monde fait d’allées sombres et de clubs miteux. Divorcé et solitaire, il faut bien qu’il se distraie parfois, n’est-ce pas.
Exit les monstres venus d’ailleurs, le fantastique et la science-fiction, Christophe Bec change de registre et s’essaye au polar classique. Un policier au bout du rouleau, une société en morceau minée par la corruption et l’appât du gain facile, des personnages secondaires pas mieux lotis et, au beau milieu, des crimes sordides à souhait. Tous les éléments d’un roman noir (de charbon) sont réunis. L’intrigue permet également au scénariste de décrire un pan méconnu de l’industrie pornographique - le cam-sex et ses itérations -, pratiques qui se sont généralisées grâce à internet. Son coût social est aussi abordé d’une manière directe et sans fausse pudeur. Pour beaucoup de femmes, devenir «virtual-girl» et proposer ses charmes en ligne est parfois la seule manière de gagner sa vie dans ce pays se classant comme un des plus pauvres d’Europe.
À l’image du New York décati des années soixante-dix, une Bucarest poisseuse et gangrenée sert de cadre à cette enquête aux ressorts bien huilés. Local de l’étape, Cristian Pacurariu la montre dans son jus et toute sa décadence. Lumière pisseuse la journée, lampadaires hésitants en soirée, le portrait de la Capitale roumaine s’avère à l’unisson des enjeux de l’album : malaisants et répugnants. Son trait réaliste, taillé à la serpe, n'y va pas par quatre chemins. Héros, criminels ou simple témoin, ils sont montrés sans fard, tel qu’ils sont, de simples pions perdus au cœur d’un jeu qui les dépasse. L’atmosphère qui en ressort est tout bonnement formidable de ressenti et fait réellement froid dans le dos. Par contre, il n'est pas assuré que le syndicat d’initiative du Petit Paris de l’Est embrasse pleinement cette peinture guère flatteuse des attraits de sa ville.
Tendu, sec et parfaitement documenté, Sector 5 n’est pas une lecture grand public, loin s’en faut. Les amateurs de noirceur et de réalisme «dans ta face» apprécieront certainement ce thriller quasi-naturaliste, frôlant même l’académisme par moments. Néanmoins, soyez averti, comme le dit le poète : «Toi qui entre ici, abandonne tout espoir.»
Les notations sont un peu dures si on pouvait mettre 3.5 ce serait plus adapté. Je trouve que cette BD mérite une note bien supérieure "bon album" mais inférieure à "A lire absolument". Cette BD est un peu difficile à noter car il y a énormément de choses à dire. Mais je mettrai quand même mon 4/5 parce que, pourquoi choisir la note inférieure ? C'est pile ou face et comme je suis gentil, je vais arrondir au-dessus.
Le polar est absolument réussi même si le scénario est du "déjà vu" ou du "déjà lu". A la différence près que le meurtre qui n'a rien à voir avec l'affaire, vient brouiller les pistes. Mais également et c'est le très bon point de cet album, c'est que si tout se tient, le Bucarest, est décrit avec beaucoup d'éléments portés à notre connaissance et vient nous apporter une certaine culture sur le pays, la ville et ce "Sector 5" et l'ambiance inimitable. C'est un point que j'ai beaucoup apprécié. Dans les polars en général, il y a aussi toujours ce cliché de l'inspecteur bousillé, ça le fait toujours et ça apporte une touche de noirceur à l'album. D'ailleurs comme je le dis très souvent et j'y crois, "l'Art naît du Trauma". Le sujet abordé est également très original et dans son milieu endémique si j'ose dire, les cam-girls, la prostitution virtuelle et la pornographie propre à la Roumanie et à l'Ukraine. Mais la France n'est pas beaucoup mieux dans le domaine de la pédo-criminalité et de la perversité sexuelle, je pense presque qu'elle détient la coupe du monde et trouverait sa place dans le panthéon du guiness book. La cruauté est également des plus terrible dans ce très bon polar. De plus, l'étrange rapport quantité/qualité/prix est excellent. J'en ai eu pour mon argent, la BD contient quand même 88 planches et il faut un sacré bout de temps pour la lire. On peut ressentir dans le dessin même s'il n'est pas au goût de tous, ni au mien d'ailleurs, un certaine nervosité. Il est piquant, fait avec beaucoup de nerf, ça en rajoute à la réussite de l'album. La colorisation également est très réussie et variée. J'ai beaucoup aimé certains côtés humains, telle que la réaction d'un homme à visionner de jolies filles nues, et ici, c'est un flic... mais ce n'est pas ce que je voulais écrire au départ. Il y a des petits clins d'œil, je ne me souviens malheureusement plus ce que je voulais écrire. Mais ce dont je me souviens, c'est que ça a à voir avec des trucs de la vraie vie, de notre temps et j'ai trouvé ça très frais, très neuf et très original. Si ça me revient je corrigerais le commentaire. A ceux qui aiment les polars, il ne faut pas passer à côté de celui-ci.
Mais, et oui, il y a toujours un "mais", outre tous ces points positifs et qui dépassent largement ce qui va venir, certaines bulles ont des textes parfois creux ou fades (je dis bien parfois) Le bureau de poste et le commissariat, m'ont posé un problème au départ de la lecture. Je pensait que Peyo était flic. J'ai dû repasser les premières pages pour comprendre. Et son rôle était trop flou au départ également. J'ai confondu les personnages jusqu'à obtenir la lumière. Enfin le côté du Serial Killer avec sa victime était trop soft. Pour ma part, le commerce du sexe devrait être prohibé sur tout la planète même s'il existe depuis la nuit des temps et ce, au nom de l'égalité des sexes, d'un commerce facile, inégal et injuste, mais aussi contre l'avilissement de la femme en général.
Dans tous les cas une très bonne BD. A surtout ne pas laisser trainer à la maison, s'il y a des enfants. Un grand "BRAVO" aux auteurs.