E
n ce printemps 1633, le royaume de France est menacé par l'apparition de la sarne, une drogue coupant la faim et rendant son consommateur plus fort. Mais elle a un revers, elle réduit la longévité. Qui peut être derrière sa diffusion ? Pour le Cardinal de Richelieu, il ne fait aucun doute que le Roi des tombes en est le responsable. De son côté, Gueule de cuir traque les dealers et parvient à la même conclusion. Et si ces deux hommes s'alliaient au nom de l'intérêt supérieur de l’État ?
Pierre Pevel s'amuse dans ce récit. Le créateur des Lames du Cardinal a déjà exploré cette période de l'histoire de France, dans la même veine mêlant fantasy et monarchie moderne. En passant du roman à la bande dessinée, il parvient à conserver le sel unique de l'ambiance unique originale. Les lecteurs y retrouvent un Richelieu à la hauteur de l'imagerie populaire : rusé, machiavélique et complexe. L'immersion avec des personnages de fiction est réussie, elle donne un ancrage réaliste plaisant. D’ailleurs, les nouveaux venus sont correctement développés. L'hommage appuyé au personnage masqué de Bob Kane, dont Pevel reprend les codes scénaristiques, amène les bédéphiles sur un terrain connu. Les amateurs d'enquêtes avec (beaucoup) d'actions sont ravis. Néanmoins, pour celles et ceux qui pensaient en apprendre davantage sur les arcanes des triades doivent encore attendre. Le scénario passe sur ce point, pour privilégier une investigation plus classique.
Les dessins de Stéphane Créty contribuent à donner ce petit goût de Batman à la série. Rien que la couverture donne le ton : un héros de trois-quarts de dos en haut d'une flèche de clocher, regarde la ville en contre-bas. Sa cape soulevée par le vent, s'envole en hauteur. De plus, l'arrivée d'un vieil homme mentor fera penser à Alfred ou bien à Bruce Wayne dans la version de Batman Beyond. Dénoncer une copie serait une grossière erreur. L'artiste insuffle une vraie indenté visuelle à son univers, les emprunts au monde des comics (le masque et la cape font diablement penser à Spawn de Todd Mac Farlane) n'y changeant rien. Les paysages, les décors, les accessoires et les costumes correspondent à l’époque du règne de Louis XIII. Ajoutez à ce bilan, les choix judicieux de colorisation de Jérôme Maffre et les lecteurs sont plongés dans cette période.
Avec La veuve, la série se densifie, sans répondre encore aux nombreuses questions soulevées dans le tome précédent. Néanmoins, Gueule de cuir propose tous les ingrédients d'une bonne série de fantasy historique, avec cette touche si particulière d'un titre à la croisée des récits de Dumas et de Batman. À suivre...
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