C
ela fait environ trente ans que le loup est de retour en France. Sur le plan environnemental, il s’agit d’une bonne nouvelle. Par contre, après avoir été absent pendant plus de cent cinquante ans (suivant la région) sa présence est souvent synonyme de nuisance avec des autochtones ayant perdu l’habitude de côtoyer la «bête». C’est particulièrement le cas pour les éleveurs de moutons. Brebis isolée ou troupeau entier, les attaques sont de plus en plus nombreuses et les dégâts se chiffrent en dizaines de milliers d’euros, sans compter le stress associé à la perte de ses animaux et de son gagne-pain. Face à cette situation, l’État a mis en place une série de mesures afin de ménager ses obligations légales (le loup est une espèce protégée, il est interdit de la chasser), tout en dédommageant les agriculteurs lésés. Cette conjonction n’est pas facile et les vieux réflexes radicaux sont prompts à ressurgir. Pourtant, la solution existe, elle est à la fois simple et complexe : il faut réapprendre à vivre avec Canis lupus. Après tout, il est chez lui et était là bien avant les hommes.
C’est dans ce contexte que Troub’s s'est joint à l’initiative «Retour du loup» menée par l’association Quartier Rouge en Nouvelle Aquitaine. L’idée de ce projet est de réunir des spécialistes (biologiste, éthologue, etc.) avec des acteurs locaux (éleveurs, agents de la faune) et des artistes afin d’explorer et d’imaginer des réponses pour que toutes et tous puissent trouver leur place sur la lande et les plateaux. Barrières électriques bien dimensionnées et stratégiquement placées, chiens de garde, certaines voies sont classiques. D’autres, nécessitant une connaissance fine des comportements, s’avèrent moins intuitives ou directes, puisqu’elles préconisent d’agir au niveau cognitif de ce canidé. Le loup n’aime pas l’homme et préférera toujours l’éviter. C’est également un routinier et, dès qu’il a trouvé une source de nourriture, il est quasiment impossible de le faire changer de chemin. Il faut donc le tromper et l’éloigner «naturellement» des zones de pâture. En plus de celle des professionnels, l’éducation du public est aussi au programme. Dernière information importante, si l’ombre d’Ysengrin fait remonter des peurs ancestrales dans la psyché commune, la grande majorité des déprédations sont du fait de chiens domestiques ou errants.
La prise de conscience écologique exige des approches respectueuses pour toutes parties prenantes, qu’elles soient humaines, animales ou végétales. Changer les mentalités, s’adapter à une réalité basée sur le développement durable et ré-intégrer à la réflexion des variables trop longtemps externalisées, la tâche se montre immense. Heureusement, une fois mise place, certaines solutions donnent rapidement des résultats tangibles et bénéfiques, tant au niveau économique que de la biodiversité.
Évidemment moins délirant ou «perché» que Le Génie des alpages du regretté F’murr, les brebis de Troub’s ne sont pas dénuées de charme et de truculence, tout en étant aussi admirablement croquées. Si l’humour est bien présent, Au loup ! – Chronique d’un retour est avant tout un album documentaire passant en revue précisément tous les aspects de cette problématique très actuelle.
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