S
ur l’île de Core, sous laquelle le magma bouillonne, Mary est dans un état catatonique. Asiel, son mari, s’apprête à partir sur le continent pour trouver un médecin, lorsqu’on lui donne le journal intime de Sarah. Cette dernière a été victime d’un mal similaire quarante ans plus tôt. Ne s’en étant jamais vraiment remise, elle a été confiée à une secte, avant de décéder dans des circonstances troubles.
Histoire inscrite dans un XIXe siècle imaginaire, éléments de fantastique, nature sauvage et côtes escarpées balayées par les vents, tout cela traduit bien un esprit gothique assumé. Le projet de Nicolas Bastide apparaît audacieux. Sur fond de relecture du mythe d’Orphée, ses personnages poursuivent une double ambition : sortir une dame de sa mystérieuse torpeur et élucider un décès remontant à plusieurs années.
Le récit se montre par moments déroutant. Toutefois, au final, tout se tient, même s’il aurait été intéressant que les deux quêtes soient davantage liées et que l’une nourrisse l’autre. Les lignes narratives se révèlent en effet distinctes ; l’une aborde un registre policier, alors que la seconde relève du répertoire fantastique, comme en témoigne la saisissante conclusion.
Le scénario est soutenu par un agréable trait charbonneux, lequel exprime bien l’atmosphère trouble régnant sur les lieux. Tout est sombre dans ces illustrations reposant sur une colorisation grisâtre, à l’exception de la lave, laquelle tranche avec la violence de ses rouges. Les paysages désolés, évoquant ceux de l’Islande, sont particulièrement réussis. Peut-être certains visages sont-ils sommairement exécutés.
Magma constitue un premier essai convaincant pour celui qui a longtemps travaillé comme coloriste (Jeanne la pucelle, Pavillon noir), avant de ranger ses crayons pendant une décennie.
Le magma est généralement une roche en fusion qui se forme à très haute température (près de 1200 degrés). On confond souvent le magma avec la lave des volcans. En effet, le magma est localisé en profondeur alors que la lave se trouve en surface.
En l’occurrence, on se situe au cœur d'un XIXème siècle un peu fantasmé au beau milieu d'une île volcanique où les passions amoureuses vont s'exacerber. La vie, la mort, la beauté, la tristesse seront les thèmes de ce conte assez tragique. Il est surtout question de religion et de croyance avec le pouvoir de ceux qui se croient investi d'une mission divine.
Un homme va mener une enquête assez discrète afin de savoir ce qui est arrivé à une jeune femme ayant découvert une autre forme de vérité. Evidemment, une île volcanique cache toujours des secrets assez bien enfouis qui ne sont pas très beaux à découvrir...
Le graphisme encré sera clairement clairement d'inspiration assez gothique pour être au service de ce récit fantastique et onirique. Les encrages sont assez marqués au niveau de la couleur noire ce qui donne un style assez particulier mais assez beau au regard. Oui, il y aura bien une certaine élégance de mise.
Le souci vient du fait que c'est assez confus dans la construction et donc assez difficile à suivre et à appréhender. La narration plutôt alambiquée vient encore plus compliquer les choses ce qui ne sera pas pour nous plaire. Il faudra s'accrocher pour bien saisir toutes les nuances à comprendre de ce récit assez énigmatique.
Cependant, pour les plus courageux, ils pourront sans doute trouver un sens profond pour le moins ésotérique pour se perdre dans ce magma en fusion et trouver une certaine forme d'extase. Cela sera sans doute sans moi même si je peux comprendre cette fascination morbide.