U
ne fillette et un garçonnet six ou sept ans se rencontrent au parc. Ils se jaugent, s’observent un moment et décident finalement de discuter et de jouer ensemble. Un peu plus loin (en dehors de l’image), leurs parents respectifs semblent se connaître. Les pieds bien sur terre, ils font comme tous les enfants et répètent les idées et les propos qui traversent la société actuelle. Leur force ? L’éternel mélange d’innocence et d’effronterie propres aux tendres années.
Un peu de Peanuts, pas mal de Calvin & Hobbes (vus le nombre de clins d’œil, l’inspiration se confond avec un hommage sincère), James se fait commentateur du quotidien par l’intermédiaire de ce duo aux langues bien pendues. Parfaitement à l’aise dans ce format court qu’il maîtrise à la perfection, l’auteur de William, 31 ans, scénariste fait feu de tout bois et, du néo-féminisme aux réalités des familles recomposées, offre un tour d’horizon des préoccupations d’aujourd’hui. À l’image de leurs célèbres prédécesseurs, les deux mini-héros tentent de comprendre ce monde dans lequel ils sont obligés de vivre et de grandir. Quelqu’un aurait un mode d’emploi pour savoir comment s’y prendre ?
Œuvre remplie d’esprit et d’humour plus grave qu’il y paraît, Garçons manqués est une lecture très drôle mettant de l’avant les absurdités et les innombrables paradoxes de nos comportements de tous les jours. Il s’agit également d’une jolie leçon à propos des responsabilités des adultes vis-à-vis des plus jeunes. Les mots ont un poids aussi important que les actes, à chacun de s’en rappeler et de les expliquer le cas échéant.
Charlie est une fille manquée qui veut ressembler à un garçon afin d'échapper à sa condition de femmes. Quant à Malcolm, il est un vrai garçon manqué qui refuse cette part de virilité. Bref, nous avons en quelque sorte deux garçons manqués dans une société qui permet désormais de choisir son genre. Ils sortent respectivement des cases traditionnelles entre ce que Trump définirait comme un homme et une femme en signant son décret symbolique lors de sa récente arrivée au pouvoir.
Ce duo va nous faire vivre des situations assez comiques mais également parfois assez touchantes. A noter qu'il s'agit d'un recueil de strip uniquement basés sur ces deux personnages qui vont nous livrer leur regard sur le monde actuel à travers des sujets comme le genre, le patriarcat, la retraite, la guerre ou encore le réchauffement climatique.
C'est un ton léger qui amène au sourire et à la bonne humeur. Cela rend cette BD plutôt d'un abord sympathique. Je trouve que cela ressemble un peu à du Calvin et Hobbes pour donner dans la comparaison. Je lis rarement ce genre de recueil mais une fois n'est pas coutume !
Ce que j'ai aimé par-dessus tout, c’est le fait qu'au-delà de l'aspect strip, on suit une véritable évolution au fil des saisons de ce duo obligé de cohabiter ensemble. En parallèle et par petites touches, il y aura l’histoire de ce couple de parents de ces mômes qui s'installent ensemble pour vivre une nouvelle histoire d'amour et de rencontre. Or, cela ne se terminera pas forcément bien. C'est la vie et cela rend la fin plutôt triste à mon goût.
A noter qu'au niveau graphique, on aura droit à une bichromie assez spéciale entre la couleur orange et le blanc. J'ai également apprécié grandement la clarté et la simplicité de ce dessin. Le tout a rendu ma lecture plutôt très agréable.
Au final, on pourra apprécier cette œuvre au décalage comique et d'un abord sympathique sur un thème jusqu'ici assez peu exploité sur ce support qu'est la BD. Un vrai courant d'air frais que la lecture de cet album.