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aufragée sur une plage inconnue, séparée pour la première fois de son mari sur cette île au milieu de nulle part, Annie va devoir ne composer qu'avec elle-même. Le temps d’une robinsonnade, celle qui se croyait perdue… se (re)découvre !
Illustratrice et youtubeuse à ses heures, Marie Spénale semblait avoir pris ses distances avec la bande dessinée, mais voici que, coup sur coup, elle publie deux albums dont le très coloré Il y a longtemps que de je t’aime.
Ceux qui voudront s’attacher à la genèse de cet album de cent-vingt-huit planches pourront musarder sur la plateforme YouTube de l’autrice et, en quelques vidéos, en apprendre un peu plus sur sa manière de dessiner et ses états d’âme.
Sous la forme d'une introspection sur le sentiment amoureux et les contingences sociales qui le corsètent, Marie Spénale semble, par le prisme de son héroïne sexagénaire, vouloir exorciser des doutes existentiels sur les subtiles différences entre l’amour et l’attachement, sur la vieillesse qui transforme les corps, sur la sensualité qui perdure malgré les rides, ou sur les concessions faites à l’autre au prix de son propre renoncement… Autant de sujets traités avec une ingénuité au graphisme acidulé qui tranche singulièrement avec la gravité du propos. De cette parenthèse sur une île métaphorique peuplée d’animaux imaginaires et d’une végétation édénique, l’important se trouve dans les dialogues et les interrogations qu’ils sous-tendent. De fait, le scénario en deviendrait presque anecdotique s’il n’était illustré avec une naïveté désarmante et une pudeur qui frôle la retenue, car à trop en dire, il y a (peut-être !) le risque de (trop) se découvrir.
Alors, même si, par de nombreux détails, cette histoire miroir ne peut se défaire d’une forme de conformisme, elle s’avère par trop délicate pour se contenter d’une unique lecture.
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