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ontréal, années 1960. Une minorité anglophone domine politiquement et économiquement la majorité francophone. Observant les succès de Fidel Castro et de Che Guevara, des agitateurs rêvent de révolution. C’est le début du Front de libération du Québec, dit FLQ. Chris Oliveros dépeint un mouvement incapable de véritablement prendre son envol par manque de compétences, de moyens et de soutien populaire. La volonté d’affirmation du peuple empruntera plutôt la voie démocratique.
Le projet aurait facilement pu basculer dans la caricature tant les militants se sont montrés candides et maladroits. L’auteur joue de prudence en adoptant un ton très factuel ; il articule son propos autour de trois hommes qui se sont succédés e à la tête de l’organisation. L’album a le mérite de mettre en lumière des événements moins connus que ceux de la crise d’octobre 1970, laquelle sera au cœur du deuxième tome de Révolution dans le Québec des années 1960.
Le bédéiste présente son récit comme s’il s’agissait d’une enquête que la CBC (Canadian Broadcasting Corporation, télévision nationale d’expression anglaise) aurait produite en 1975, sans jamais la diffuser. Le discours n’ayant rien de particulièrement subjectif, le bédéphile ne voit pas pourquoi la censure serait appliquée, d’autant plus qu’au même moment le film Les ordres de Michel Brault critiquait vertement la brutalité de la réponse canadienne.
La formule du faux reportage permet tout de même de décrire certains épisodes selon différents points de vue ; transparaissent alors les divergences. Ouvriers, patrons, activistes, badauds, locuteurs français et anglais n’ont évidemment pas une lecture identique des faits.
D’abord publié dans la langue de Chester Brown, l’ouvrage est destiné à un lectorat qui aurait gagné à mieux comprendre le contexte sociopolitique ayant favorisé l’éclosion de l’insurrection. Ce n’est que dans la postface que ces explications sont données. En trois pages, le scénariste résume de belle façon les causes de la sédition.
Le lecteur de bandes dessinées indépendantes américaines se trouve en pays de connaissance (l’auteur a fondé Drawn & Quaterly, un important acteur du neuvième art en Amérique). À défaut d’être séduisantes, les illustrations naïves épaulent efficacement le récit, sans vraiment le transporter. Les personnages sont schématiques et les cases, généralement très petites, imposent des décors souvent schématiques.
Un choix typographique paraît étrange : les francophones s’expriment en minuscules et les anglophones en majuscules. Comme si l’éditeur de la version française laissait entendre que les années passent, mais que ce sont toujours les mêmes qui parlent le plus fort.
Un sujet sensible, abordé avec respect… peut-être trop. Il aurait été intéressant d’avoir une perspective anglophone sur ces événements.
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