Lowreader 3. Distorsion

Q uel serait le point commun entre ce que cache le Dark Web, des palettes de jeux vidéos enterrés en plein désert et la toxicité de certains « influenceurs » ? D'excellents sujets pour des histoires étranges et flippantes sur l’ère du numérique.

Le concept de la série orchestrée par RUN ? Pour chaque volume, un thème décliné en trois histoires, plus ou moins courtes. Crées par des artistes 619, elles sont ponctuées de commentaires ou d'articles et d'une nouvelle, tous signés d'autrices ou d'auteurs proches du label. Après deux premiers volumes remarqués, ce troisième opus, conçu en collaboration avec le duo québécois aux manettes du podcast Distorsion (pour lequel RUN a illustré les deux romans parus aux Éditions De L'Homme), s'intéresse au numérique et à certaines de ses dérives.

La première histoire, scénarisée par RUN et mise en images par Petit Rapace (Slum Kids) s'intéresse (comme son titre l'indique) aux red rooms*. Rumeur ou réalité, quoi qu'il en soit, l'intrigue imaginée par le duo s'avère glaçante grâce, notamment, à son dessin expressif et dynamique, même si l'issue se devine quelque peu.

Après une excellente nouvelle de Tanguy Mandias pour laquelle Florent Maudoux joue des pinceaux, le deuxième acte revient sur un épisode datant de l'explosion des jeux vidéos. Toujours sur un scénario du créateur de Mutafakaz, c'est Rours (déjà aperçu sur The Midnight Order et Doggybag) qui officie au dessin. Particulièrement stressante et plutôt sanglante, la trame est bien servie par une mise en scène énergique et prenante du début à la fin.

Enfin, Piwan se charge seul de la dernière histoire. Si la trame peut paraître classique avec la question récurrente de l'influence d'un media sur le comportement des jeunes (ici les influenceurs remplaçant les jeux vidéos ou les films), le traitement est réussi. Le dessin réaliste comme le rythme sont maitrisés, ce qui conduit à une jolie montée en tension jusqu'à la conclusion.

Il est également à noter que les trois récits jouissent d'une mise en contexte pertinente et détaillée du duo Seb et Émile qui amplifie à chaque fois l'immersion et participe à la qualité de la collaboration entre Distorsion et 619.

Ce troisième volume confirme toutes les qualités de « l'anthologie d'histoires courtes de suspense, d'horreur et d'exploitation » du label 619. Ce LowReader x Distorsion offre une plongée inquiétante dans les méandres du numérique et prouve, si nécessaire, que l'écurie 619 a beaucoup d'idées et encore quelques talents à faire découvrir au public.

Lire la chronique du tome 1 et la preview.

NdC * : sites, à accès payant, qui diffuseraient des scènes de torture voire de meurtre en direct sur le Dark Net.