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RIP 6. Eugène - Toutes les bonnes choses ont une fin

16/10/2023 4998 visiteurs 7.0/10 (3 notes)

E ugène n’a jamais eu de chance. Criminel de dixième ordre en liberté conditionnelle, il vit dans une caravane avec sa mère, une mégère acariâtre. Victime de violence scolaire, familiale et carcérale, le chétif devenu costaud se venge en tapant sur tout un chacun. Il travaille pour une entreprise spécialisée dans le nettoyage de maisons où des personnes sont décédées, parfois depuis plusieurs mois. Le taf étant aussi répugnant que mal payé, il est tentant de voler un objet précieux. La disparition d’une bague marque d’ailleurs le point de départ (et d'arrivée) de RIP, une série en six volets.

Toutes les bonnes choses ont une fin conclut la saga. Chacune des publications raconte un personnage dans un livre composé de segments alternant entre le passé du protagoniste et une époque indéfinie, probablement les années 1990, où sont réunis les acteurs. Les mésaventures sont sensiblement les mêmes d’un opus à l’autre, seul le point de vue diffère. Le lecteur se sent un peu comme l’enquêteur qui entend différents témoignages pour avoir une juste compréhension des événements. La structure pourrait s’avérer complexe, mais Gaet’s en assure la lisibilité. Une relecture de l’ensemble permet toutefois de mesurer la rigueur de son travail et, surtout, d'apprécier la richesse de la construction.

Au terme de cet ultime chapitre, où l’auteur attache les ficelles, le bédéphile ressent cependant une certaine insatisfaction. Alors que l’atterrissage se fait sans réelle surprise, il se demande si la cinquième livraison, consacrée à Fanette, n’aurait pas constitué un meilleur épilogue. La perspective de la tenancière, en retrait de l'action, offre un regard différent sur les choses. Pour tout dire, Eugène n’est pas le personnage le plus intéressant et il y a relativement peu à dire sur lui.

Les illustrations semi-caricaturales de Julien Monier demeurent à la hauteur du projet ; l’artiste démontre avec éloquence la misère économique, sociale et affective des compagnons d'infortune. Son dessin, avec mouches, moisissures et effluves que le lecteur devine nauséabonds, exprime les conditions peu enviables dans lesquelles s'exerce le boulot. Tout apparaît sombre dans ce récit, y compris la colorisation toujours foncée, comme si un fin voile de suie s’était posé sur les planches.

Succès populaire et critique, RIP aborde le polar d’une façon très originale, il serait étonnant que cette série repose en paix, six pieds sous terre.

Par J. Milette
Moyenne des chroniqueurs
7.0

Informations sur l'album

RIP
6. Eugène - Toutes les bonnes choses ont une fin

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L'avis des visiteurs

    ArvoBlack Le 13/12/2024 à 22:39:01

    Dès les premières planches du premier tome, la série "RIP" donne le ton ; c'est brut, noir, caustique et sans filtre, d'autant plus avec le métier exercé par nos compères (des “cleaners” en version trash). Ce qui fait tout le charme de cette série, c'est qu'elle est racontée de différents points de vue, le narrateur change à chaque tome et on se confronte aux opinions de 6 personnages, leur façon d'interpréter la réalité, tout en faisant avancer le propos au fil des tomes.

    Si le T1 permet d'introduire les grands axes de l'histoire, beaucoup de séquences ne sont pas directement compréhensibles et c'est la suite avec les 5 autres tomes qui nous en diras plus. Le rythme et le découpage sont excellents, les séquences se déroulent parfois dans un ordre non-chronologique, mais la narration et les ambiances (couleurs, lieux, dialogues) font qu'on arrive toujours à situer la temporalité des événements, ponctués par des citations et autres réflexions de personnalités, de films ou de livres entre les différentes séquences. Toutes les personnalités décrites dans chaque tome sont intéressantes, on a différents ressentis selon le personnage.

    Ce style de narration ouvre les possibles sur différentes interprétations de la réalité, en changeant de narrateur, nous avons une autre vision de celle-ci et c'est toute la force de la série, nous amener à changer d'état d'esprit pour démêler le faux du vrai.

    Le léger reproche qu'on peut faire à "RIP" c'est la répétition de certaines scènes clés, on revisite souvent les scènes importantes avec un cadrage différent, mais les éléments sont déjà connus. Pour une lecture espacée dans le temps, rappeler ces éléments peut être bénéfique, mais pour une lecture rapprochée (moins d’une semaine) de la série en entier, cela devient redondant.

    A l'instar du scénario, le dessin est lugubre et macabre, il est excellent et correspond tout à fait à l'ambiance de la série, un certain réalisme se dégage du dessin pour les lieux, les objets. Les personnages sont plus caricaturaux et d'une grande expressivité. C'est une des meilleures série du genre “thriller” que j'ai pu lire ces derniers temps : c'est dense, les personnages sont complexes, le découpage monstrueux et efficace, les détails ont leur importance, La représentation du mouvement est excellente.

    Une série qu'il est urgent de lire si cela n'est pas déjà fait, car elle est qualitative sur beaucoup de points ! Il faut juste ne pas trop être dérangé par le trash et le dégoûtant car la série est remplie de moments macabres, même si les personnages représentés de manière caricaturale permettent de se détacher plus facilement de la violence et de l’aspect glauque des illustrations.

    BudGuy Le 19/04/2024 à 21:11:41

    Avis global portant sur la série.

    'RIP' est une plongée dans un monde sordide, déliquescent et misérable où chacun/chacune essaye à sa manière de s'en sortir. Nous y suivons un groupe de bras cassés ayant chacun ses casseroles et/ou ses addictions se faisant exploiter, par une société plus que douteuse, comme déménageurs d'un genre bien particulier.

    L'histoire est découpée de façon méticuleuse et chaque album apporte le point de vue différent d'un autre personnage, sur une histoire de diamant dérobée, à la manière du film 'Rashomon'.

    Le ton est ouvertement outrancier, cynique et vulgaire faisant le portrait au vitriol d'un monde qui ne tourne plus rond depuis un petit moment, où seule la loi du plus puissant et du plus rusé prime. Il s'agit du genre de série dont la noirceur imprègne les planches grâce aux dessins et couleurs sombres de Monier. Même si étonnamment il y a un "happy-end" à la fin, je m'attendais à une fin différente pour Fanette qui était le personnage le plus intéressant.

    Malgré son manque d'optimisme et quelques clichés de personnages, c'est plaisant à lire en raison de la construction de l'intrigue et des répliques d'humour noir qui parsèment le tout.

    Sweethy Le 21/12/2023 à 06:04:12

    Voici la magnifique révélation finale d'Eugène sur cette aventure.
    En nous faisant part de son passé énigmatique, il nous dévoile les dernières pièces de ce puzzle.
    En combinant tous ces indices, nous serons en mesure de résoudre l'énigme principale, qui implique une collusion entre des agents de police arrogants et des personnalités importantes.
    Les cinq premiers albums étaient déjà captivants, mais cet album final l'est tout autant, avec toujours autant de puanteur et de scènes sombres entourées de mouches.
    C'est ainsi que ce sixième tome clôt cette aventure.
    Néanmoins, est-ce vraiment fini ? En examinant la dernière page, le mystère reste entier quant à une éventuelle suite.

    Yovo Le 22/10/2023 à 19:09:25

    ::: SPOILERS :::

    Pour un fan de la 1ère heure comme je le suis, difficile de ne pas être légèrement déçu à la lecture de ce dernier tome. Légèrement, ai-je dit. « Eugène - Toutes les bonnes choses ont une fin » n’est pas moins bien que les autres. Mais il n’est pas mieux non plus.
    Et c’est justement de là que provient ce sentiment de trop peu.

    L’ensemble de la série étant magistralement orchestré depuis le début, le désir d’avoir un ultime volume inégalable, incomparable, finissant en apothéose ce thriller génial, était légitime, voire obligatoire.

    On aurait tellement eu envie d’un twist final qui remette tout en perspective et justifie la narration éclatée entre les 6 personnages choisis pour l’incarner ! « L’intrigue » étant résolue dès le 1er chapitre, j’avais espéré un climax, une montée en puissance autour d’un élément nouveau, dont le dernier personnage aurait été la clé. Mais non. Pas non plus d’énigme supplémentaire apportée par la superposition des points de vue. Et c’est là que je rejoins l’excellente remarque du chroniqueur : Eugène, caricature de gros beauf dont le parcours un peu pathos a tendance à excuser la bêtise, n’est pas particulièrement intéressant. C’est évidemment Fanette qui aurait dû clore la série. Elle est de loin le meilleur personnage, le plus réussi, le plus mystérieux, le plus ambivalent, et le seul qui aurait pu (qui aurait dû ?) faire basculer l’histoire.

    Alors, dommage ?
    Non.
    C’est parce que RIP est si bien que j’eus souhaité que ce fût absolument parfait. Mais à défaut de perfection, elle reste une grande série, une de celles qui fait date. Parfaitement écrite, parfaitement dessinée. C’est incontestablement une nouvelle référence de la BD. Ne serait-ce que pour avoir repoussé les limites aussi loin. Mais ne nous y trompons pas, si l’insondable noirceur qui s’en dégage est largement décomplexée, elle est néanmoins indispensable à l’histoire. Et le plus remarquable, c’est que tout un panel d’émotions infuse peu à peu au fil des pages, par-delà la fange humaine si lugubrement mise en scène. Le glauque absolu est atteint, certes, mais avec la manière…

    C’est bien simple, à partir de maintenant, pour évaluer le degré de noirceur d’une œuvre, je parlerai de l’échelle de RIP !

    Touriste-amateur Le 02/10/2023 à 18:40:13

    Je suis rarement à l'aise avec les albums de fins de série et j'étais inquiet en attaquant cette lecture...

    J'ai trouvé que ça démarre un peu lentement, mais on comprend mieux à la fin.
    L'album revient bien sur les différents protagonistes (peu sur Maurice), ce qui permet de faire le tour.

    Quelques manques de fluidité dans le scénario qui, parfois, m'ont fait revenir en arrière car j'avais l'impression d'avoir raté une page!
    Pour cela, l'album ne mériterait peut-être que 4sur5, mais pour l'ensemble de l'oeuvre, je mets 5!

    A noter que mon ado, fan de Mangas et pas du tout de mes BD a également adoré l'histoire et ses 6tomes.

    RoRk41 Le 17/09/2023 à 15:49:19

    Cette polyphonie narrative en 6 volumes trouve ici une fin magistrale.
    Le boucle est bouclée, la bague retrouvée, Eugène décrypté et la morale un peu sauvée.
    Toutes les bonnes choses ont une fin!