« Sans enfants, je ne peux pas prétendre à un logement plus grand. Et sans logement plus grand, je ne peux pas faire venir mes enfants ». Voici le constat paradoxal et tragique d’une mère de trois enfants, à Port-de-Bouc, près de Marseille. Son quotidien est constitué du ménage à faire dans l’hôtel voisin, des démarches dans les offices gérant les appartements sociaux, de quelques discussions avec les voisins et le rituel du repas en famille, à 19h30 précises. Leyli Maal aime raconter son parcours, des rêves nés sous le soleil écrasant du Sahel à l’échouage dans la cité phocéenne, en passant par le cauchemar de l’attente au Maghreb. Pendant ce temps, au Red Corner, François Pellegrin, les yeux bandés, se laisse attacher au montant du lit par sa partenaire, rendu docile par la promesse d’un jeu sexuel voluptueux. Mais la jeune fille lui taillade les veines, après lui avoir fait une prise de sang. Il sera retrouvé exsangue. Entrent alors en scène Peter Velika et Julo Flores, affectés à l’enquête. Rapidement le nom de Vogelzug apparait, une association d’aide aux réfugiés.
On la trouvait plutôt jolie emprunte sans fard son titre au premier vers de la chanson Lili de Pierre Perret, évoquant l’accueil hostile reçu par une jeune Somalienne venue à Paris pour voir si les préceptes de Voltaire et d’Hugo étaient encore d’actualité. Ça a d’abord été un roman de Michel Bussi (Presses de la Cité, 2017) au succès incontestable. Joël Alessandra (Errance en Mer Rouge, Les Voyages d’Ibn Battûta) en propose une adaptation graphique, affichant généreusement cent quarante-quatre pages. Il n’en faut pas moins pour exposer des drames individuels et collectifs, pour démonter le fonctionnement de l’économie cachée qui exploite la détresse des migrants et pour mettre en scène un polar avec précision et efficacité. L’histoire de Leyli, objet de plusieurs incises, emmène rétrospectivement le lecteur à Segou, au bord du fleuve Niger, à la naissance d’une envie, celle d’une vie différente, ailleurs. Le Mali, la Tunisie et la Sicile, étapes d’une odyssée où alternent souffrances, humiliations et espoirs. L’histoire tournoie autour d’un flic véreux, de son collègue candide, d’un directeur mythomane, de criminels de haut vol et d’enfants assoiffés de vengeance, en quête d’identité.
La noirceur du thème et de plusieurs protagonistes contraste avec la parfaite mise en image de Joël Alessandra. Son dessin réaliste, tirant vers la ligne claire, est riche de couleurs franches et tranchées. Les univers de Jacques Loustal ou de Miles Hyman ne sont pas loin. Le travail à l’aquarelle donne toute la douceur et l’expressivité dont ce récit a besoin. Les planches sépia consacrées aux retours en arrière sont des espaces de poésie.
Entre jour et nuit, tendresse maternelle et prostitution, trafic d’humains et altruisme, On la trouvait plutôt jolie balaie l’humanité dans tout ce qu’elle peut avoir de vile ou de lumineux. Cette approche constitue le parfait contrepoint narratif de La Fissure de Spottorno et Abril (2017), enquête implacable sur ce qui se trame aux frontières. Tout comme la chouette, motif récurent de l’album, les individus ont une part d’ombre et recèlent des secrets, qui finissent par être trop lourds à porter.
Le suspens est sans doute haletant (Confer la critique du chroniqueur), mais encore faudrait comprendre quelque chose à l'histoire!
Si l'alerte sur le sort des migrants est louable, la manière dont est conduit le scénario m'a laissé de marbre. C'est confus, avec des protagonistes dont on ne comprend pas forcément les ressorts. Et puis, il y a aussi les changements de scènes trop fréquents avec des passages "du coq à l'âne" pénibles (les premières fois, je pensais que j'avais sauté des pages!)
La fin est totalement alambiquée.
Le roman a peut-être été un succès, j'ai beaucoup de doute pour sa version BD...
Petite déception pour cette adaptation de Michel Bussi, le scénario est souvent confus avec des manques de repères géographiques.
J'ai largement préféré l'adaptation de "Nymphéas noirs".