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as facile d’être «un fils de», surtout quand il s’agit d’une personnalité de l’ampleur de Méphisto, le maître des Enfers. «Encore trop petit, trop jeune, pas assez mature… Pfft, je vais lui montrer de quoi je suis capable !» Ni une ni deux, Mimiphisto échafaude un plan et se dirige vers le fin fond des limbes. Un endroit mal connu où il aura tout l’espace pour faire la preuve de sa valeur. Encore faut-il que quelqu’un l’entende ou le remarque dans cet au-delà oublié de toutes et de tous…
Esthétique de livre jeunesse, ambiance logiquement ténébreuse vu de le cadre général et personnage principal faussement machiavélique à la bouille aussi ronde que celle d’Astro ou de Casse-Noisettes, Mimiphisto peut se lire comme un conte d’Hoffmann revisité par Paul Grimault. Il s’agit néanmoins d’une vraie bande dessinée réalisée avec talent et une inventivité visuelle spectaculaire. Pierre-Henry Laporterie entraîne son héros dans une histoire poétique entre fable d’apprentissage et rite de passage sur fond de rythmes païens que n’aurait pas renié Piotr Ilitch Tchaïkovski.
Au-delà des références et du vernis néo-classique de son récit, l’auteur raconte une histoire universelle. Celle d’un gamin qui grandit et qui souhaite être considéré comme l'adulte qu’il pense être devenu et plus comme l’enfant qu’il est encore. Le fait qu’il soit le rejeton du Diable apporte évidemment du piquant et une atmosphère qui, si elle ne sent pas trop le souffre finalement, plonge ces péripéties dans un monde d’ombres étranges et juste apeurant comme il faut. Résultat, le lecteur tremble avec son nouvel ami en l’accompagnant jusqu’au terminus des terminus.
Grandir, oser prendre des initiatives, se tromper et trébucher pour mieux se relever, Mimiphisto (superbe titre au demeurant) parle de tout cela et bien plus. Derrière les hésitations et les envies d’émancipation, même au bord du Styx, le temps passe inexorablement et les êtres aimés peuvent disparaître.
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