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ne bagarre de bistrot provoque un mort à Noirmoutier. Ce fait divers tragique et banal serait passé inaperçu si un pote du patron n’avait pas demandé au célèbre Jacques Gipar de venir enquêter. Jojo le Breton a beau être un ancien bagnard, il est rangé des voitures depuis des années, cette rixe mortelle cache une entourloupe, c’est certain. Ni une, ni deux, convaincu qu’il y a matière à article, le journaliste saute dans sa Dauphine et part pour la Bretagne. En roulant bien, il pourra éviter la marée.
Série vintage et de genre, Les aventures de Jacques Gipar joue la double carte de la nostalgie et des belles mécaniques. Un héros «à l’ancienne», caricatural à l’extrême, une vague intrigue policière et des jolies voitures toutes plus rutilantes que les autres, le titre pourrait passer pour un sympathique pastiche ou hommage à Gil Jourdan ou Starter. Il l’est d’ailleurs certainement. Par contre, là où le bât blesse pour de bon, le scénario de Thierry Dubois semble également tout droit sortir des années cinquante, comme si l’histoire de la bande dessinée s’y était à jamais arrêtée. Déroulement linéaire dénué de surprise, rebondissements téléphonés, personnages monolithiques sans profondeur et humour daté, la lecture avance pépère au rythme tranquille d’une 4CV aux carburateurs encrassés. Ça permet au moins d’admirer les carrosseries et le paysage entre deux bâillements.
Visuellement, Jean-Luc Delvaux offre une copie agréable, malgré des couleurs basiques abusant de dégradés peu engageants. Comme pour le récit, le style reprend les principaux attributs de l’école de Marcinelle : trait semi-réaliste à la limite du gros nez, découpage et mise en scène tenue et bien dans les clous. Heureusement, les véhicules, les vraies stars du show, sont admirablement rendues, sous tous les angles et toutes les coutures. Il ne manque qu’une copie du manuel de l’utilisateur en annexe pour être totalement complet.
Classicisme un peu trop poussé sans aucun recul sur lui et trame ultra-simpliste, Le trésor de Noirmoutier échappe de peu à la noyade grâce aux soins et à la précision apportés à ses illustrations.
Je me prononce sur la série complète qui n'est pas entièrement satisfaisante. Du bon côté, le dessin est net, précis, clair, le scénario compréhensible, l'effort documentaire fructueux, l'époque rendue avec crédibilité - et les vieilles bagnoles, ah, ça vaut le détour rien que pour les vieilles bagnoles. Mais, du mauvais coté, qu'est-ce que c'est répétitif ! Répétitif d'une page à l'autre (enquête, poursuite, enquête, poursuite, enquête, poursuite, rebondissement, poursuite, ... ad nauseam), et répétitif d'une BD à l'autre avec des scénarii très semblables. En bref, on peut lire le premier tome, le dernier, et avoir ainsi pigé le sens de la série sans passer par le reste. Pour amateur de vieille bagnoles seulement ; les autres se lasseront très vite.
Le N ième Jacques Gipar, bien loin des premiers et sans doute meilleur que les suivants ... Ici, le scénario est inconsistant.
Dans ce tome, on boit, on mange, on passe le Gois.
On reboit, on remange, on se bagarre, on repasse le Gois.
On re-reboit, on re-remange, on se re-bagarre, on re-repasse le Gois.
On re ...
Et bien évidemment on a droit aux personnages en rade au milieu du Gois.
Tillieux avait magnifiquement traité la panne dans une des aventures de Gil Jourdan. Ici c'est plat, les personnages marchent tranquillement alors que la marée monte (pas de courant visiblement). Petit-Breton se vautre sur marche glissante (hi hi comme c'est drôle).
L'auteur réutilise le dialogue du Corniaud (film de Gérard Oury) : "Elle va marcher beaucoup moins bien, forcément".
Et à la fin, le collabo en imper genre Gérard Jugnot dans Papy fait de la résistance.
Pour ceux qui aiment voir des BD avec des Facel Véga, des Dauphine, de vieilles Panhard.
Ne vous arrêtez pas à la chronique, elle n'a rien compris au principe de cette série.
"Jacques Gipar" est une excellente série, qui se déguste comme un bon vin, à lire le soir, dans son fauteuil, prêt pour une immersion dans les années 50, l'élégance et les bons mots.
Oui, cette série est clairement nostalgique, et plaira aux plus jeunes comme aux anciens, à ceux qui ont vécu cette époque comme à ceux (comme moi) qui ne l'ont pas du tout connu.
Série d'utilité publique, ce nouvel opus est très agréable à lire, parce qu'il contient tous les ingrédients d'un bon album. Pas besoin de réviser son "Gil Jourdan" pour apprécier.
L'appel du large, le passage du Gois comme si on y était, des personnages truculents et très "Bd de l'age d'or", ambiance ambiance...
Vivement le prochain album !!!!
Comment ne pas craquer devant cette superbe couverture qui nous replonge instantanément dans l’ambiance du chef-d’œuvre de Maurice Tillieux, « La voiture immergée », troisième et incontournable album de Gil Jourdan. Car oui, il s’agit bien d’un hommage appuyé au grand Maurice. Les références à Gil Jourdan sont nombreuses, des ambiances à l’intrigue, de la voiture Dauphine de Gil Jourdan qui devient celle de Jacques Gipar en passant du jaune au rouge, des rapports amicalement moqueurs entre les personnages, des décors de Vendée à certaines scènes directement empruntées à Tillieux. Comme dans un bon vieux Gil Jourdan le récit s’ouvre sur un rendez-vous de bistrot où le bref dialogue pose la trame de l’histoire. Et il n’y a pas que des références à « La voiture immergée » : par exemple lorsque Jacques Gipar se déguise en électricien de l’EDF (gaz & électricité français) pour s’introduire chez le suspect, la scène fait allusion à une similaire de Gil Jourdan dans « Patée explosive ».
« Le trésor de Noirmoutier » situe son action en 1956, tandis que Maurice Tillieux réalisa son Gil Jourdan en 1958. Les deux histoires exploitent la singularité du passage du Gois, une route de plus de quatre kilomètres de long reliant la côte française à l’île de Noirmoutier, et submergée par la mer à marée haute. Honnêtement cet album est réussi, même s’il n’égale évidemment pas Tillieux. Mais on est loin du fiasco lamentable des « Camions du diable », la reprise du Marc Jaguar créé par Tillieux avant Gil Jourdan, et à laquelle s’était risqué le même dessinateur, Jean-Luc Delvaux. Il était alors complètement à côté de la plaque et de l’esprit de l’original. Voici qui est rattrapé pour les nostalgiques dont je suis, avec un scénario qui tient la route malgré quelques petites faiblesses dont la répétition redondante du passage de justesse à la marée montante. Une mention particulière pour les couleurs chatoyantes des carrosseries de voitures.