L
e lanceur d’alerte est une personne comme les autres. À cette différence qu’un jour il a connaissance d’un comportement répréhensible. Fermer les yeux n’étant pas une option, il choisit de dénoncer un déversement de produits chimiques, des abus policiers ou une magouille financière. Il court alors des risques, par exemple celui d’être intimidé et stigmatisé ; certains y laissent du reste leur chemise. Flore Talamon raconte l’aventure de neuf de ces individus.
De ces enquêtes émerge un schéma presque invariable : épiphanie, dénonciation, ivresse, puis isolement quand il n’y a plus rien à dire et que les médias passent à un autre sujet. Certes, la loi Sapin 2 protège celui qui sonne l’alarme, mais il y a peu à faire quand une réputation est entachée. En fait, ceux qui ont préservé leur anonymat s’en sortent généralement mieux.
Édité en collaboration avec la Maison des lanceurs d’alertes, cet ouvrage est à la fois un reportage, un manifeste et un manuel. Chacun des chapitres rappelle une situation inacceptable et se conclut par une fiche d’information. Un des objectifs est d’ailleurs d’outiller le dénonciateur pour qu’il ne se mette pas trop les pieds dans les plats, notamment en collaborant avec des associations ayant développé une expertise dans le domaine. Cette portion, très documentée, captivera le militant ; le bédéphile lambda sera cependant tenté de sauter ces pages techniques. Ces dernières risquent aussi d’être périmées au fur et à mesure que les règles évolueront. Restera tout de même une série de cas de figure, tous dignes d’intérêt.
Le dessin semi-réaliste de Bruno Loth convient bien au projet. La narration prenant en grande partie la forme de discussions entre la journaliste et ses contacts, les illustrations apparaissent souvent statique, entrecoupé çà et là de plans de coupe présentant le héros en action. Comme il s’agit de présentations de type journalistique, ce n’est pas vraiment dérangeant. L’artiste présente à quelques reprises des infographies synthétisant et dynamisant le contenu.
Lanceurs d’alerte intéressera probablement le lecteur de la Revue dessinée, mais n’est pas fondamentalement destiné à l’amateur de bandes dessinées. Cela dit, le propos se veut important ; dans un monde complexe et en perte de repères, il est bon de savoir que certains se souviennent que la justice (et par extension l’éthique) demeure une vertu cardinale.
Des tranches de vie, de gens ordinaires qui ont un jour voulus faire respecter la loi. Toujours le même schéma il semblerai que nous revenions vers le monde d'avant la révolution. Les pauvres sont menacés et avilis, les puissants ne sont pas coupables, ni responsable