L
es rumeurs évoquent une sorcière se nourrissant d’animaux écrasés. Snap, diminutif de Snapdragon (fleur de muflier) n’est pas crédule et ne prête pas d’attention à ces fadaises. Mais un jour, son chien Good Boy disparaît. L’adolescente ressent alors l’irrépressible besoin d’en avoir le cœur net. Elle s’introduit dans l’antre de la vieille femme et y découvre son ami à quatre pattes… Enfin, à trois pattes désormais !
Kat Leyh gravite dans le milieu de la littérature jeunesse depuis quelques années. Elle a notamment participé à l’aventure Lumberjanes dont les droits ont été acquis par Urban Comics. Elle a récemment réalisé l’aquatique Thirsty Mermaid (non traduit en français) et a produit une série d’illustration de couvertures pour Boom ! Studios. Avec Snapdragon, elle prend seule les rênes d’une histoire et propose un univers atypique et bienveillant.
L’autrice raconte le quotidien particulier d’une gamine au tempérament bien trempé. Elle est élevée par une mère célibataire dans une banlieue typique du nord des États-Unis. À la nuit tombée, elle dévore des long-métrages d’horreur et s’empiffre de sucreries. Au début de la fiction, son toutou est son seul camarade. En classe, elle est isolée en raison de son originalité. Lorsqu’un matin, son fidèle animal demeure introuvable. Aussitôt, elle dévale les reliefs qui l’amènent jusqu’à une vielle cabane, en bordure des bois et pénètre par effraction dans la maison d’une « magicienne ». La pseudo-nécromancienne s’appelle Jacks – âgée et acariâtre. La confrontation vaut son pesant de cacahuètes. Sans dévoiler les arcanes du récit, ce duo de personnages principaux va se lier d’amitié. L’étrange hobby de la mégère va passionner la fillette et l’ouvrir ainsi aux autres. Les seconds couteaux qui apparaissent alors sont unanimement truculents et leur destinée intéresse également la narratrice. Le scénario réussit d’ailleurs à tracer des parallèles et à raccrocher les wagons des séquences avec cohérence… Et peut-être même grâce à une touche d’énergie immatérielle. Chut !
Kat Leyh accroche son lecteur dès les premiers récitatifs et tout au long des deux-cent-quarante pages qui mêlent péripéties, tranche de vie et humour. Sa fable auto-conclusive est admirablement élaborée et les arcs narratifs déployés sensibilisent les plus jeunes autant à la différence qu’au déterminisme genré. Habilement diffus, pas moralisateur, son propos met à l’honneur la bonté des protagonistes et leur diversité. Bravo !
L’artiste possède un style semi-réaliste, expressif (parfois caricatural) et tout en rondeur. Son trait en courbe apporte une dose de dynamisme décuplée par un jeu de cadrage et des postures justement croquées. Le format comics et son gaufrier réduit contribuent fortement à l’impression de mouvement. Ne vous fiez donc pas à cette première de couverture, plutôt statique. La vie est présente dans cette nouvelle. Et elle prend de nombreuses teintes colorées au gré des ambiances développées.
Le dernier-né de la collection Graphic Kids des éditions Kinaye est un modèle de bande dessinée feel good. Une narration millimétrée, un ton léger et rigolo, porteur de belles valeurs, Snapdragon est un récit jeunesse à mettre entre toutes les mains !
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