D
ans les rues de la capitale bruxelloise, en cette fin de 2016, un quidam se promène, inquiet. Ses mains le piquent bizarrement. Normal qu'il stresse, Arthur est un indécrottable hypocondriaque. Ce qui semble beaucoup plus étrange par contre, ce sont ces ombres gigantesques qui caressent les murs et les traces profondes qu'elles laissent sur les bâtiments, comme les griffes ou les dents d'un monstre énorme ! Imagination, délire ? Un bien ou un mal ?
Vincent Zabus et Thomas Campi (Macaroni !, Les petites gens) se retrouvent dans un nouveau récit pour le moins surréaliste. Ils décrivent le quotidien d'un quadragénaire - angoissé de nature - et développent ses réflexions qu'il partage directement avec le lecteur en s'adressant à lui. Sa rencontre avec une artiste de street art va le bousculer et secouer sa léthargie, provoquant ainsi ce fameux éveil, nécessaire et vital pour éviter l'enlisement et l'acceptation du n'importe quoi (en écho résonne l'actualité des élections américaines entre Clinton et Trump). Le duo, totalement opposé dans leur caractère, constitue le cœur de l'intrigue et la dynamise. Leurs échanges, empreints de pertinence et d'humour, génèrent aisément l'empathie, sans lourdeur. À la fois au travers de cette introspection et de ces interactions, l'ouvrage se révèle une métaphore de l'être humain qui se focalise sur les détails, oubliant qu'il fait partie d'un tout qui s'endort et devient aveugle et sourd aux signes annonciateurs de déclin moral et social. La construction narrative est assurément originale, mélangeant habilement le réel et l'imaginaire : la conscience du héros trouve sa soupape dans un dialogue imaginaire avec mère, ses ex, ou encore lui étant enfant.
Sur une mise en page classique, le dessinateur met en scène les acteurs à l'aide d'un trait fin et travaillé dans un style plutôt réaliste. La palette restreinte de couleurs douces au pastel est complétée d'une trame légère au crayon pour accorder de la texture, le rendu est très agréable à l'œil. Ce travail d'ambiance rappelle celui de De Crecy ou de Kokor. Quelques effets visuels bien trouvés participent au côté perché de l'histoire.
Malgré une fin un peu convenue, cette fable contemporaine burlesque et atypique dans son concept narratif sait démontrer qu'il ne suffit pas d'entendre et de voir, mais bien d'écouter et de regarder, ceci afin d'échapper à la tentation du sommeil pernicieux qui s'impose aux consciences.
Cet album m'a été directement recommandé par ma libraire spécialisée en BD. Comme je suis assez souvent ses conseils, je l'ai directement acheté. C'est toujours un risque car on ne sait pas certain sur quoi on va tomber au juste et si cela va nous plaire.
Il faut dire que le récit commence assez bizarrement sur les angoisses d'un citadin solitaire en mal de vivre. Il est vrai qu'il y a plus réjouissant comme lecture surtout en ce moment où nos pires angoisses se sont bien réalisés à travers le monde. Triste époque.
L'action se situe en 2016 juste avant l'élection de Trump qui est évoqué et qui semble presque irréalisable tant l'avance de Clinton dans les sondages était un fait donné. Cependant, on découvrira que l'impensable peut parfois de réaliser avec les conséquences désastreuses que nous connaissons aujourd'hui. Bref, c'est basé sur les possibilités qu'une catastrophe puisse survenir dans nos vies à l'instar de cette grosse branche d'arbre qui s'abat juste à côté de notre principal protagoniste.
Il est question de la rencontre avec une jeune femme décalée qui fait une forme d'art social et militante à la manière d'un Banski pour faire bouger les lignes hors de la zone de confort ce qui va ébranler un peu les habitudes de notre héros. C'est tout le récit de ce parcours initiatique pour mettre fin à ses angoisses qui le hantent assez régulièrement. Évidemment, cela sera bénéfique au final.
C'est par moment assez loufoque et burlesque ce qui n'est jamais pour me plaire car je suis un peu à la recherche d'une cohérence dans l'esprit. On arrive mal à relier les actions les unes des autres parfois. Cependant, on comprend tout de même la ligne et la direction générale à savoir un éveil dans la vie parfois si dure. Bref, on pourra tomber sous le charme de cette histoire.