« Les vrais héros de cœur maternel, ce sont les enfants juifs. Ceux que je n'ai pas pu sauver comme les quelques-uns qui ont supporté de changer d'identité, le temps de survivre, pour perpétuer l'histoire familiale. »
En quelques mots, Irena Sendlerowa résume sa philosophie. Ce qu'elle a fait lui apparaît normal et, surtout, loin d'être suffisant. Tout au long de cet ultime tome, de la préface de Marek Halter au dossier final consacré à l'héroïne, le duo de scénaristes montrera à quel point les actions de cette femme courageuse auront été guidées par son dévouement et l'amour qu'elle porte aux enfants et à leur survie. Avec le même talent dont ils avaient fait preuve au cours des quatre opus précédents, les auteurs livrent des séquences où au détour d'une page, le lecteur se retrouve saisi. Une double planche dans laquelle les fantômes des parents apparaissent, un gros plan sur les larmes qui descendent les joues de Yéféfiyah ou d'Irena, une ribambelle d'orphelins en haillons, surgie d'un wagon ou d'un camion, têtes basses et yeux hagards, David Evrard n'a pas besoin de beaucoup d'effets pour transmettre les émotions. Sans en faire trop, ses compositions que les tons légers, tout en nuance, de Walter accompagnent avec à propos, rendent les ambiances avec justesse.
Les scènes au présent, lumineuses, apportent une touche de légèreté bienvenue tandis que les souvenirs évoqués s'habillent de tons (et d'atmosphères) plus sombres. Car si le marron a remplacé le noir sur les uniformes, et les libérateurs soviétiques l'envahisseur germanique, l'atteinte aux libertés n'a pas disparu, l'injustice ne s'est pas évaporée et les épreuves ne se sont pas envolées. Toujours surveillée et régulièrement brimée, Irena continue son combat bien après que ne cessent ceux du conflit international. Malgré une fluidité en deçà - la faute à des sauts temporels moins bien amenés - la fresque peinte par les auteurs garde, à l'image de leur héroïne, toute sa force. La portée de son geste résonne avec plus d'ampleur lorsque le destin la remet sur la route de petits devenus grands. Son destin hallucinant vaut bien cet hommage à la hauteur du courage dont elle a fait preuve tout au long de son existence.
Avec cette conclusion, Sandrine Tréfouël, Jean-David Morvan, David Evrard et Walter hissent Irena à sa juste place : tout en haut des meilleures séries tous publics sur la Seconde Guerre mondiale. Une lecture aussi indispensable que La guerre des Lulus et Les enfants de la résistance, tant elle est marquante et émouvante.
La série Irena qui est composée de cinq tomes, nous plonge tout droit dans les horreurs de la Seconde Guerre Mondiale. Nous y découvrons une jeune femme, Irena Sendlerowa qui n'aura de cesse de se battre pour sauver des vies. Ainsi, grâce à son courage et sa force de caractère, Irena va faire sortir des enfants du ghetto de Varsovie. Résistante et profondément humaine, Irena est une véritable héroïne. Bien que n'étant pas citée dans les livres d'Histoire, elle est une figure majeure de cette période.
Jean- David Morvan et Stéphanie Tréfouël, ont eu la lourde tâche de raconter son histoire. Irena a eu une vie tellement riche, qu'il devait être compliqué d'en capter les moments clés. Pourtant, les deux scénaristes ont su narrer avec brio cette histoire très touchante. Tout ceci aurait pu très vite sombrer dans le sordide mais ce n'est pas le cas ici. L'ensemble est raconté avec beaucoup de pudeur. Irena est d'ailleurs la narratrice principale. Le scénario la présente comme une femme humble, sensible et pleine de pudeur. Il aurait donc été de mauvais goût de verser dans des démonstrations explicites de violence. Pourtant, cette dernière est bel et bien présente. Mais, elle est toujours sous- entendue, ce qui la rend d'autant plus insupportable car notre imagination a tôt fait de remplir les manques.
Une telle histoire, se devait d'avoir une esthétique à la hauteur. Le challenge a été relevé par David Evrard et Walter Pezzali. Irena présente une esthétique qui pourrait s'apparenter à du dessin pour les plus jeunes. Les personnages ne revêtent pas de multiples détails et pourtant... Avec ce dessin en apparence simple, David Evrard colle parfaitement à l'idée de la pudeur. Il ne tombe pas dans un ultra réalisme qui pourrait vite paraître sordide. Au contraire, son esprit graphique traduit parfaitement l'indicible par des traits simples et clairs. À plusieurs reprises, des gros plans sont faits sur des regards qui se troublent. Là aussi, point de détails mais cela suffit à faire passer le message. Quant aux couleurs, elles évoluent selon l'époque, selon les lieux. Je suis très sensible au travail de la couleur. Ces dernières sont ici très tranchées mais traduisent parfaitement une atmosphère spécifique.
Irena est donc une série de BD émouvante, mettant en avant une héroïne de la guerre trop peu connue à mon goût.
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