E
n manque de kérosène, un avion se trouve dans l’obligation d’atterrir. Par chance, il survole une grande route peu utilisée. Tant mieux, l’impact est violent ! La pilote, Nora Parks, sort indemne du crash et poursuit sa route. Elle prend rapidement possession d’une voiture du FBI, dont les deux agents assurent la sécurité autour de l’aéronef en feu. En regardant son rétroviseur central, elle voit un détenu. C’est Jack. Menotté à la portière, il échappe pour le moins fortuitement à son escorte policière. Pendant ce temps-là, le président des États-Unis recherche l’appui des nations alliées pour organiser des représailles et l’agent de la CIA, Lancaster, est à pied d’œuvre en Europe pour arrêter les terroristes informatiques.
Le scénario de Chaos, le deuxième volet de la série Cyberwar, s’éloigne de la promesse du thriller réaliste. Les événements abordés dans cet opus se caractérisent, a contrario, par des incohérences à répétitions. L’auteur, Daniel Pecqueur (Golden City, Arctica), élude notamment toutes les conséquences économiques d’un arrêt de la première puissance mondiale, faisant fi de l’imbrication des échanges commerciaux. Les scènes se déroulant en Hollande sont représentatives de cette dichotomie. La vie s’écoule paisiblement aux bords des canaux d’Amsterdam, alors que c’est l’apocalypse dans les rues de New-York. Autres écueils, les dialogues des personnels politiques sont ponctués d’explications infantilisant le lecteur. L’intrigue et les jeux de pouvoirs ne peuvent jamais prendre de l’ampleur puisque chaque intervention du dirigeant yankee est complétée par une question d’un collaborateur visant à justifier la stratégie élaborée. Quant au personnage principal des débuts, son arc narratif se clôt promptement au quart de l'album.
À l’opposé des lourdeurs d’écriture, la mise en images de Denys (Le Casse – Soul Man, La Grande Évasion – Fatman, Sept Survivants) est limpide. L’épaisseur de son trait manque de variations, mais sa copie est appliquée. Il ne délaisse jamais les arrière-plans et il s’avère très adroit pour agencer les planches d’intérieur où les protagonistes s’accumulent dans de petits espaces. La gestion du noir oscille entre aplats sur les objets inanimés et accumulation de traits directement sur les protagonistes. Plus rarement et pourtant bien senties, le dessinateur a apposé ses empreintes à l’encre sous les véhicules en mouvement afin de rendre l’effet irrégulier du macadam. Autre bon point, les vues aériennes garantissent une parfaite lisibilité des déplacements automobiles. Dommage cependant que les choix de cadrages excluent strictement les contre-plongées, surtout en ce qui concerne les cases d’interrogatoire (ou plus exactement de torture).
La gamme chromatique de Jean-Paul Fernandez (Nevada, Wonderball) est contenue sans laisser l’impression d’un déficit de couleurs. Quelle que soit la séquence, sa palette est identique. Tout juste perceptible, l’intensité des tons chauds augmente du côté de la Havane alors que les actions aux Pays-bas se couvrent davantage d’un dégradé de bleu. En somme, le rendu est très proche de la photo des productions hollywoodiennes, de la chaleur du récit catastrophe à l'ambiance humide du polar.
Le coup de génie est à mettre au crédit de Nicolas Sinner (Horacio d’Alba) qui réalise une couverture magnifique. Sa composition réinterprète cinq pages en un seul dessin. Une évidence !
Au final, cet épisode alterne le pire et le meilleur. Un rebondissement succède à un autre, le tout formant un divertissement qui nécessite un total lâcher prise. Un tome trois est déjà annoncé, mais est-il vraiment attendu ?
Cette suite monte d'un cran et accélère le rythme. Maintenant que les bases sont posées, on suit avec passion l'enquête de Lancaster qui suit de prêt la piste des cyber-criminels. On sent vraiment que les événements s’enchaînent rapidement et que les Américains sont à cran.
Avec un dessin toujours aussi simple mais efficace, et un univers moderne et proche de nous, je me retrouve à être de plus en plus intéressé par cette série.