C
harly Malfède connaît des nuits agités. Au réveil, il attrape un crayon et esquisse ses cauchemars dans un carnet. Un petit livre rempli d’ombres menaçantes et de ponts brinquebalants. Un matin, dans la cour du collège, il surprend son ex petite-amie amourachée d’un lycéen planté fièrement à côté de son scooter. Une image s’impose alors à l’adolescent, celle d’un terrible accident. Le lendemain, il apprend que sa vision s’est réalisée. Les tourtereaux ont été admis en réanimation. Est-il responsable ? Par ailleurs, son meilleur copain tousse soudainement. Les mouchoirs sont tâchés de sang. En ouvrant son cahier, le jeune homme s’aperçoit qu’il a déjà représenté son camarade sur un lit d’hôpital. Et ces voix qu’il commence à entendre. C’est évident, il devient fou !
Les scénaristes, Christian Carayon et Michel-Yves Schmitt, installent leur série fantastique en usant de certains lieux-communs, l’anti-héros rejetant les événements, les parents en cours de séparation, l’aide providentielle à la fois d’une rebelle gothique et d’un professeur impliqué. Ces repères sont actualisés par les auteurs qui introduisent des concepts plus contemporains, notamment le harcèlement scolaire.
En entame du récit, un enseignant choisit comme sujet d’étude le film de science-fiction l’armée des douze singes dans le but d’animer un débat sur la peur du progrès. Cette scène n’est pas anodine et elle est remarquablement utilisée. Elle permet d’exposer des personnages, de faire naître des intérêts entre eux, de justifier des dialogues sarcastiques et d’introduire progressivement la thématique de la folie. Tout au long du scénario, les écrivains poursuivent les parallèles avec la production cinématographique de Terry Gilliam. Pas sûr, néanmoins, que les jeunes lecteurs profitent jusqu’au bout de la métaphore filée.
Au dessin, l’artiste italienne, Alessandra Marsili, œuvre parfaitement pour rendre lisible les différents arcs narratifs. Son style graphique est très léger. Le trait est fin et aérien, pas toujours très détaillé en arrière plan, laissant la couleur animer les formes. Les séquences d’hallucination sont très contrastées, que ce soit en matière de cadrages ou de colorisation, un rose et un violet réhaussant des aplats de noirs. Elle utilise, mais plus rarement, un encrage pigmenté sur un fond sombre pour pointer cet éloignement du réel.
Issu de la collection Frissons des éditions Jungle, ce premier volet présente de nombreuses qualités. Il ne manque pas de rythme, la mise en place est détaillée et l’album se termine sur une rencontre qui laisse Charly dans l’expectative. Cette fin est bien amenée et provoque une forte attente. Espérons que le prochain tome réponde aux multiples questions laissées en suspens.
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