A
vant, la société était composée des pauvres et des riches. On ne se fréquentait pas, mais on pouvait se croiser par hasard dans la rue. Maintenant, c’est plus compliqué. Les démunis sont toujours à la même place, tandis que le choses ont bougé chez les nantis et avoir du pognon n’est plus une garantie de faire partie de la « haute ». Il y a les 1 %, on les imagine à peu près, ils roulent en grosses berlines électriques et se tapent la cloche chez les multi-étoilés Michelin©. Et puis, à peine perceptible, les 0,01 % ont fait leur apparition dans les statistiques. Ceux-là sont plus mystérieux : un passage furtif sur un tapis rouge prestigieux, un discret jet privé en bout de piste, une poignée de main avec le président à Davos et rarement un gros chèque de charité presque anonyme. Nos Chères élites, celles qu’on admire et jalouse.
James et François Ravard doivent quand même bien les aimer, puisqu’ils s’amusent à les châtier le temps d’un album faussement rétro. Dessins d’humour façon Sempé (sans la grâce de ce dernier malheureusement), histoires courtes mêlant critiques acerbes et constats consternants, les deux auteurs rabâchent les clichés habituels quand il s’agit d’aligner les classes supérieures. Le résultat est amusant, parfois très drôles, mais sent surtout le réchauffé et la redite. D’Hara Kiri à Fluide Glacial, ainsi que dans la grande presse, le sujet a souvent été abordé sur tous les tons et de toutes les manières. Le trait vintage du dessinateur est néanmoins à relever. Avec son dessin et ses couleurs typées années cinquante, Ravard injecte une dose d’intemporalité patinée à ces saillies contemporaines. Finalement, hier et aujourd’hui ne sont pas très différents, ce sont juste les échelles de valeur qui ont changé.
Recueil de gags très, voire trop, classiques, Chères élites manque d’originalité ou d’un point de vue nouveau pour vraiment convaincre.
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