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aris, fin du XIXe siècle. Émile Farges, alias Trouveur, jouit d’un don. S’il cherche une personne, il n’a qu’à lancer un caillou sur un plan et la petite pierre lui indiquera où elle se trouve. Lorsque la fille et l’épouse d’un mafieux sont enlevées, c’est tout naturellement que le caïd se tourne vers le radiésthésiste. Pour le convaincre d’obtempérer, il prend en otage son enfant, Claire, et sa douce moitié, Léonie. Le délinquant en aura cependant plein les bras avec cette dernière qui appartient aux Sœurs de l’Ubiquité, une communauté de femmes hors du commun. Certaines sont prescientes, d’autres discernent instantanément le bon ou le mauvais chez les gens, la compagne du héros s’avère quant à elle incroyablement forte. Féministes et anarchistes, elles se servent de leurs habiletés pour venger leurs consœurs, victimes des hommes.
Le récit de Gess se montre ténébreux, particulièrement la psychologie des personnages, laquelle est explorée à l’occasion de fréquents retours dans le passé. Ces parenthèses révèlent des blessures, expliquent les motivations de chacun et assurent la progression de l’enquête. L’éthique constitue néanmoins le cœur du projet. Celui qui en a les moyens est-il en droit d'imposer sa loi et ses sanctions ? Les criminels le croient ; ils sont structurés, ont leurs règles et arrivent à se passer de la justice pour faire régner l'ordre. Mama-Brûlé et sa sororité en sont également persuadées ; après tout, elles disposent de pouvoirs leur permettant, elles aussi, de sanctionner les crimes. Mais est-ce légitime ? Toutes ces questions en amènent d’ailleurs une autre : la responsabilité. Celui qui profite d’un privilège a-t-il un passif envers ses concitoyens ? C’est ce que pense le paladin qui a choisi de collaborer avec la police. Ce n’est du reste pas sans raison que le texte est émaillé de citations tirées du Contrat social de Jean-Jacques Rousseau.
Le dessin de style expressionniste colle admirablement au propos. Il exacerbe toute l’étrangeté des interprètes, lesquels présentent souvent des bouilles incroyables. Les décors fourmillent pour leur part de détails qui traduisent l’esprit de la capitale française il y a un peu plus d’un siècle. Le format du livre est réduit (comparable à celui d’un « comic ») et les cases abondantes, petites et saturées ; de l’ensemble se dégage un sentiment d’oppression, qui demeure lui aussi en phase avec le scénario. La composition repose sur une abondance de vignettes pleine largeur qui préservent un certain équilibre, marque une pause et laissent respirer des planches fréquemment étouffantes.
Enfin, mentionnons que les éditions Delcourt ont bien fait les choses en gratifiant l’album d’un dos toilé, et d’un titre embossé et doré, sans oublier les pages tachées de telle façon qu’elles évoquent de vieux papiers accablés par le passage des ans, la négligence des gens et les moisissures.
Des acteurs nombreux et complexes, au service d’une histoire originale inscrite dans Les contes de la pieuvre, une série de grande qualité, dont les différents tomes peuvent être lus individuellement.
Quel conteur que ce Gess.
Semblable au premier, mais plus structuré, plus simple. Peut-être parfois trop? N'empêche, j'ai beaucoup aimé ma lecture. Meilleur que le premier? Ça dépend. J'aime que les personnages aient des 'talents', et heureusement que 'la bête' a eu son histoire en fin d'album, parce que j'avais trouvé son passage trop rapide, justement. Si vous avez aimé le premier, vous aimerez le deuxième. Sinon, ce deuxième tome ne vous fera pas changer d'avis. Le dessin n'est toujours pas ma tasse de thé, mais il a le mérite d'être clair la plupart du temps.
Hâte de voir ce que Gess a à offrir pour le troisième!
Nouveau chef d'œuvre. Ici il est question d'amour, de justice et plein d'autres choses qu'un grand livre peut contenir.. La lecture est haletante, émouvante, riche ! Et l'histoire de la bête à la fin est belle à pleurer. Merci
J'ai eu un peu de mal à rentrer dans l'histoire qui s'installe petit à petit, mais vu le "pavé", ça ne crée pas de frustration une fois qu'on est dedans!
Je me suis donc régalé avec cet opus qui est d'un niveau identique au premier. Quel plaisir de lecture, quelle ingéniosité!
A noter que chronologiquement (par rapport à l'histoire), ce tome se situe après le troisième alors qu'il est sorti en second. J'ai suivi le conseil de mon libraire m'invitant à le lire en 3ème après "Célestin et le coeur de Vendrezanne" et j'ai trouvé cela plutôt pertinent.
5 étoiles pour cet album exceptionnel. Gess au sommet de son art nous entraîne dans un univers empreint de poésie et de noirceur. J’emploie rarement le terme de chef d’oeuvre, mais il décrit parfaitement ce « Destin de Trouveur ». A mon sens, le plus réussi des trois contes de cette série tout à fait exceptionnelle.
Merci Monsieur GESS !!!
Chef d’œuvre scénaristique !
Un homme, en jetant en caillou sur une carte, localise tout ce qu'il cherche. Que faire de ce don? On peut traquer des personnes en tant que policier mais aussi trouver l'Amour.
L'auteur renforce l'univers du tome 1 avec plein de nouvelles familles (et dons associés) interagissant entre elles.
Le découpage ressemble à un story board, les dessins pas super clairs, mais la colorisation renforce les sentiments ressentis au fil de la lecture.
J'en suis à ma troisième lecture: toujours aussi jouissif !
Dans la continuité du premier album, ce second opus des contes de la pieuvre est pour moi encore plus maitrisé.
Le dessin volontairement "sale" et "vieux" ne fait que renforcer l'immersion dans un Paris stupéfiant.
Les personnages sont atypiques, magistraux, surprenants. L’ambiance est fascinante, magique, hypnotique…
L'histoire principale qui est d'ailleurs superbement scénarisée, se retrouve agrémentée de multiples références et liens au premier album avec notamment l'apparition de Babel et de l'Hypnotiseur.
Cela permet de garder un vrai lien dans l'ensemble de l’œuvre.
Avec une série comme celle-ci, qui plus est implantée d’une pléiade de personnages très complexe, Gess a ouvert une porte sur un univers très large qu’il va pouvoir aisément exploiter pour notre plus grand plaisir.
J'ai hâte de découvrir le prochain conte...
M. Stéphane Gess, merci d’avoir pris le temps d’apporter une réponse utile à mon 1° avis sur votre album "Un destin de Trouveur". Cet avis, comme je l’avais précisé, n’était fondé que sur des critères subjectifs. Je rajoute qu’il ne s’agit pas réellement d’une déception, votre travail sur ce titre restant remarquable. J’ai simplement préféré "La malédiction de Gustave Babel" que je considère comme un chef d’œuvre, et je m’en suis expliqué. Mais sur la base de critères parfaitement objectifs, il serait juste de dire qu’"Un destin de trouveur" mérite lui aussi largement ses 5 étoiles.
Les explications que vous m’apportez sur sa conception sont évidemment pertinentes et prouvent à quel point vous maitrisez votre sujet (mais je n’en doutais pas...).
Pourquoi ne pas alors en faire profiter tous vos lecteurs en reprenant cet éclairage passionnant dans une page d’introduction sur le prochain tome ?
Prochain tome que, dans tous les cas, j’achèterai les yeux fermés. Merci et bravo !
Yovo
Il est peu dire que j'avais apprécié le premier tome et je suis tout aussi enthousiaste sur ce nouvel opus, voire encore plus.
L'histoire, pourtant simple à la base, est passionnante grâce à des qualités narratives hors pair. Des personnages que l'on aime ou pas, mais toujours intéressants, vibrants et vivants. Un univers si habillement construit que le fantastique ne l'est plus.
Le tout sublimé par une partie graphique pleine de grâce, de puissance évocatrice, bref... pas juste de belles planches mais une partie intégrante de la narration.
Un véritable accord "met / vin" réussi .
Yovo, je comprends votre déception de ne pas retrouver le même charme dans "Un destin de Trouveur" que dans "La malédiction de Gustave Babel", mais, dans ce dernier opus, le ton et le thème sont portés sur la colère, l'injustice et l'humanité. J'ai abordé ce récit sous un autre angle que Babel, vous pouvez ne pas y trouver votre compte, je comprends, mais c'est ma façon de gérer ces récits. Je ne pouvais pas raconter cette histoire sans y aller frontalement. Babel était écrit sous l'auspice de Baudelaire et du sleen de Paris et la mise en couleur va avec (à la fin de l'album, quand il est en Argentine, la couleur apparaît, : le spleen est passé), Trouveur l'a été sous celle de J.J. Rousseau, donc l'homme libre, la nature, c'est pour cette raison que la couleur est plus présente car la vie se devait d'être éclatante, tout comme l'histoire de la Bête me paraissait évidente, d'une part pour expliquer se personnage et d'autre part car c'est l'homme libre, nu, rousseauiste, tout comme la couleur verte, vision subjective d'Émile, tienté par le même Rousseau... au contraire du flash-back rouge de Léonie à la fin du récit...Coriace... Le suivant sera sans doute écrit différent des deux premiers, pour les raisons précédemment évoquées
Mon avis ne vaut qu’en comparaison à "La malédiction de Gustave Babel", le 1° tome des Contes de la pieuvre.
Curieusement, j’ai moins bien aimé "Un destin de trouveur". C’est rythmé et bourré d’action certes, mais ‘Babel’ est beaucoup plus onirique, étrange et poétique, dimensions auxquelles je suis en général plus sensible.
Sur le plan graphique, j’ai également préféré les tonalités ocre de ‘Babel’ que la palette plus colorée de ‘Trouveur’ et tous ses flash-backs bleus-verts.
Mais c’est surtout au niveau des personnages que la différence est la plus frappante : là où Gustave Babel était un poète amoureux, aussi invulnérable que fragile, "Un destin de Trouveur" met en scène une galerie de superhéros assez bas du front… Par exemple, ces "coriaces" aux yeux rouges et à la force surhumaine ne m’ont pas forcément plu et n’apportent pas grand-chose au fond du récit. Idem pour "La bête" qui a la force de Hulk associée à la vitesse d’un guépard, alors que son apparence est celle d’un gamin fluet, sans qu’on ait l’explication de ce phénomène... Sur certaines scènes, c’est du Marvel ! C’est dommage, car cela dénature la belle ambiance réaliste créée par les décors.
Bref, "Un destin de Trouveur" reste un très bon album mais qui, pour toutes ces raisons, n’a pas autant retenu mon attention que l’incroyable "Malédiction de Gustave Babel".
une bd incroyable, originale ,étonnante et prenante.
A collectionner d'urgence pour les bédéphiles exigeants.
Une vraie claque! Quel talent. Impossible de décoller de la Bd.
Vivement un autre épisode...et oui merci.
MONSTRUEUX ! dans tous les sens du terme.
Un second tome qui enrichi encore plus le monde surprenant et inventé par Gess.
Merci, merci, merci
Un chef d'oeuvre ... tout simplement!
Le must du must de la BD contemporaine.. tout comme le précédent Gustave Babel.
Je met très rarement 5, mais là ...
Rien à rajouter