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hef d'une grande entreprise, Matthias d'Ogremont présente tous les symptômes du «no life». Il consacre la totalité de son temps et de son énergie à son travail : réunions, enjeux commerciaux, partenariats, comptabilité et gestion du personnel, le P.D.G court dans tous les sens et surtout beaucoup trop vite. Cette addiction à son job, aux technologies et outils de communication, affecte ses relations sociales et sentimentales. Comme un déclic, le décès brutal de sa secrétaire va lui faire prendre conscience que c'est peut-être le moment pour lui de décrocher avant qu'il ne soit trop tard.
« Se retrouver face à face avec soi-même. N'est-ce pas potentiellement la pire compagnie qui soit ? » - Jim
Pour son pitch, Thierry Terrasson alias Jim, auteur incontournable du neuvième art, s'est inspiré et servi de l'expérience d'une de ses connaissances, auprès de qui il a emprunté les grandes lignes de ce récit. Dans ce premier opus, il livre les diagnostics de pathologies fréquentes chez l'homme stressé et surmené, qui sont le burn out et surtout l'accident vasculaire cérébral. Progressivement, le lecteur fait connaissance avec un responsable d'une firme qui ne sait plus où donner de la tête, étranglé par d'importantes responsabilités professionnelles et également intoxiqué par son téléphone dont ses yeux ne quittent plus l'écran. Avant que le cerveau ne sature et se mette à hurler « stop », la psychanalyse alarmante indique la vitalité et l'urgence de mettre un frein à cet engrenage et à cette lente descente aux enfers. La thérapie s'offre à lui sous la forme d'un stage de sevrage qui prône l'équivalent d'un retour aux sources : isolement en pleine cambrousse, confiscation des appareils connectés, régime alimentaire et méditation sont au menu d'un programme strict et encadré. Avec ses qualités, mais aussi ses défauts, et grâce à des dialogues subtils, le personnage central qui vit dans le déni et lutte en permanence contre ses démons, demeure singulier, attachant et ponctuellement touchant.
La palette de couleurs utilisée par Antonin Gallo (narrations numériques sur Le monde de Minito et sur À l'ombre du cerisier), navigue entre le marron, l'orange, le gris et leurs nuances, ce qui sied parfaitement à l'ambiance du thème exposé. D'une beauté indéniable, celles-ci procurent une certaine sérénité. Parce qu'il est précis et qu'il se focalise sur les traits des visages, le coup de crayon réaliste est envoûtant et renvoie de très belles cases, qu'elles soient petites ou qu'elles prennent la taille d'une planche. Ainsi, chacun pourra aisément s'identifier à ce businessman et à sa quête de rédemption. Les seconds plans qui sont tout autant travaillés, n'alourdissent en aucun cas des images bien proportionnées.
Détox agissant un peu à l'image d'un anxiolytique, la posologie préconise la lecture de deux tomes. Il est donc conseillé de poursuivre le traitement.
J’avoue que je suis plutôt un fan des dernières productions de Jim qui aborde généralement des histoires intéressantes avec une vision moderne des choses entre l’amour ou l’amitié. Pour autant, je n’ai pas trop aimé cette production.
En effet, je ne suis guère preneur de sujet traitant des problèmes existentiels de bobos. J’y suis même très allergique devant tant d’autres problèmes bien plus importants dans le monde comme la pauvreté et ces gens qui ont du mal à joindre les deux bouts. Devant tant d’opulence, je suis un peu sidéré.
C’est vrai que je n’ai pas aimé ce héros quinquagénaire, gros et barbu avec ses certitudes de DG, qui se tape toutes les filles comme si cela pouvait exister dans la vraie vie. Certes, le physique moche ne fait pas tout. En l’occurrence, c’est l’argent et la réussite qui procurent ces ouvertures. Je n’aime pas non plus l’infidélité. Bref, il transpire toutes les valeurs que je n’apprécie guère. Sans compter le fait de rester tard au boulot pour se donner l’impression de cravacher.
Au-delà de ces aspects subjectifs (et je le concède), c’est la construction de ce scénario qui pêche car rien n’est crédible. Pour rien au monde, je n’aurais fait une telle cure de détox non pas pour alcoolisme mais pour lâcher prise. On a envie de fuir avec le bonhomme mais ce dernier n’y parvient pas à cause de messages pourtant habituels sur son portable. Bref, on n’y croit pas une seule seconde. Les scènes semblent être surjouées.
Au niveau du graphisme, je n’ai rien à redire car il est très agréable à la lecture. Il y a certains gros plans qui font leurs effets.
La question est maintenant de savoir si je lirai la suite. Probablement mais dans un espoir que celle-ci soit un peu meilleure. Après le déni, l’acceptation.
Cet album a le mérite de nous faire réagir et de nous remettre en question. Dans un monde de technologie ou l'homme est régi par son emploi du temps surchargé, comment réagirions-nous en pleine cure de Détox à se retrouver face à face avec soi-même ?
A travers cette question les auteurs déroulent un récit poignant dans lequel chaque lecteur se reflète aisément.
Renforcé par un beau dessin et une mise en couleur en bichromie oscillant entre le marron, l'orange et le gris, cette fable sereine et envoutante est très profonde et nous apporte un bon bol d'air frais dont on a tous bien besoin.
Après le Déni de cette première partie, l’Acceptation prévue dans la seconde devrait conclure d'une façon pérenne et touchante cette thérapie de Détox.
Je ne sais que penser de cette BD outre que j’ai bien rigolé et que le graphisme sur tons sépia me plait beaucoup.
Il s’agit en fait d’un monde de barges hyper connecté qui va à la rencontre d’un autre monde de barges hyper… hyper quoi d’abord ? Ces deux mondes me font peur. Le premier, je le connais très bien puisque j’affronte (oui il s’agit bien d’un réel affrontement) tous les jours ces êtres qui se pensent supérieurs à la recherche de l’économie réelle, sorte d’animal imaginaire qu’ils espèrent pouvoir dompter sans savoir vraiment à quoi il ressemble. Le plus souvent ces personnages sont odieux et tellement imbus d’eux-mêmes.
Alors, moi le DSI d’un monde d’abrutis, dont hélas je fais intégralement partie, je ne suis pas très fier de mon PC, de mes deux portables, de mes tablettes et de mes smartphones (le pro et le perso). Car même si j’ai toujours refusé d’entrer dans le jeu pitoyable des réseaux sociaux (Facebook, Twitter, Instagram,..), je vois bien que le monde d’aujourd’hui m’a enchaîné. J’entends déjà les voix qui me susurrent, mais bédéthèque, c’est un peu un réseau social, spécialisé d’accord mais réseau social quand même. Comme quoi, impossible d’y échapper.
Des Matthias d’Ogremont, il y en a beaucoup et je les fréquente de loin en loin. Ils pensent avoir le monde dans leurs mains alors qu’ils ne sont que des marionnettes dans d’autres mains. Certains sont prisonniers de leur patrimoine et du bien-être de ceux qui les entourent. Trop réfléchir à son état reviendrait à imaginer son monde s’écrouler comme un château de cartes. La déchéance et le regard des autres c’est cela qui nous pousse à ne jamais freiner. Et pourtant, combien aimeraient tout recommencer et combien… recommencent. Personnellement, exploser une salle serveur à coup de batte de baseball, quel pied cela serait (doux rêve).
Quand tous ces jeunes défilent pour la planète, seraient-ils prêts à abandonner ordinateur, smartphones, jeux vidéo énergivores. La critique est facile mais où sont les solutions. Aucun état ne rétro pédalera. Ce serait céder sa place sur l’échiquier mondial.
Et ce cher Christian, qui a servi de modèle pour l’histoire de Matthias a-t-il des enfants de 18 et 20 ans qui sont dans les plus grandes écoles parisiennes qui coûtent une blinde ? A-t-on le droit d’abandonner et d’aller à la « détox » en disant à ses enfants « désolé, je n’ai plus de quoi payer ». Car si on travaille comme des forcenés c’est aussi pour leur avenir. Spirale sans fin que l’on a peur d’arrêter.
Quand je regarde les passages de la BD avec la tarte aux pommes et les senteurs de sucre caramélisé et de cannelle, les mêmes flashs me viennent à l’esprit. D’autres de bonheur simple s’entrechoquent et révèlent un monde disparu ou le temps durait plus longtemps (et oui c’est possible).
Il faut quand même dire que ces satanés objets connectés nous ont pourri même les vacances. Alors aujourd’hui, même si les mails et les SMS s’accumulent pendant ces moments familiaux… c’est tant pis pour eux. La détente avant tout et nul n’est indispensable.
Je suis très curieux de connaître la suite de détox. Cette BD me touche de prêt, me fait rire en me donnant envie de pleurer. Comme on ne pleure que sur soi-même autant avancer.
C'est avec surprise que j'ai découvert en librairie la dernière bd signée Jim. Alors que je l'attendais pour le fin du second diptyque d'"une nuit à Rome", voilà que Jim nous offre une grande bouffée d'air frais avec "Détox", dont il réalise le scénario et le dessin des personnages, avec Antonin Gallo qui assure la partie décor. Pour comprendre l'histoire de cet album,(scénario et méthode de travail) je vous invite à vous rabattre sur la version canalbd de cet album limitée à 1200 exemplaires).
L'histoire? Elle est toute simple, un cadre sup au bord du burn out , part sur un coup de tête, rejoindre un stage de détox, où il devra abandonner notamment son "cordon du monde", son téléphone portable.
Le scénario repose essentiellement sur le personnage de Matthias, cadre sup bourru et cynique, qui m'a fait songer , par son (mauvais) caractère à Gabriel , le grand père dans "l'adoption" de Zidrou & Monin. Les dialogues font souvent mouches et les situations cocasses.
C'est drôle, émouvant parfois, et on regrette presque d'avoir attendre le tome 2 pour en connaitre la conclusion.
Avec "Détox", Jim s'éloigne un peu de ses précédents albums qui traitaient de la crise du couple autour de la quarantaine, avec des personnages au physique plus commun.
Côté dessin, je suis toujours aussi fan du dessin de Jim, avec une mention spéciale pour la mise au gris d'Antonin Gallo, qui donne à cet album un relief particulier.
Un lecture très agréable