E
n se plaçant sous la protection de César, Cléopâtre a réussi un coup de maître, pourtant, tout danger n’est pas écarté. Furieux, Ptolémée XIII entreprend de reprendre les rênes du pays pour lui seul et tente de chasser les troupes romaines. Pour régler ce nouveau bras de fer avec son frère/époux, la jeune femme use de son charme et de son art consommé de la manipulation. L’enjeu : conserver le trône et assurer l’indépendance du royaume. Bougeant les pions à sa guise, la vision de la souveraine porte loin, jusqu’à Rome où son consul d’amant prend le pouls du peuple et fait face à la résistance d’une frange des sénateurs.
Dans ce deuxième volet de la série consacrée à la belle Lagide, Marie et Thierry Gloris, en scénaristes avisés et connaisseurs, poursuivent sur la lancée de l’album précédent. Ils mettent à jour les jeux politiques (tant en Égypte que dans la Ville éternelle), l’art de la séduction, la complexité des relations et des fidélités toutes plus ou moins intéressées. Leur Cléopâtre se révèle éclatante autant que subtile, d’une intelligence redoutable et d’une fringance juvénile exacerbée semble-t-il par sa certitude absolue d’être une élue, presque une déesse, - aspect renforcé par les rêves qu’elle fait.
Alors que la première partie du tome relate ses dernières passes d’armes avec son pharaon de frère et mari, la voyant triompher à sa manière, la seconde moitié transporte le lecteur et l’héroïne à Rome où la situation est bien différente. Là, où la souveraine triomphait d’un côté de la Méditerranée, elle n’est perçue de l’autre que comme une étrangère. Les nouveaux enjeux et potentiels adversaires qui apparaissent sont bien amenés et la trame laisse déjà entrevoir comment le destin va se nouer.
Au dessin, Joël Mouclier anime avec talent la galerie de personnages illustres. Son trait expressif rend remarquablement la splendeur royale de la reine, la stature de César, la désinvolture et l’épicurisme de Marc-Antoine, la bonhomie érudite de Cicéron ou encore les ombres jalouses qui passent dans le regard d’Octave. Les décors, riches, ne sont pas en reste et, parés d’une colorisation aux teintes lumineuses, créent de très belles ambiances, tandis que le découpage net et précis assure une bonne lisibilité.
Difficile de résister aux appâts de ce second épisode de Cléopâtre, lequel confirme que la tétralogie en cours s’inscrit comme un fleuron appréciable des Reines de sang.
> Lire la chronique du tome 1.
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