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ous avions laissé Didier Kassaï et sa famille au printemps 2013 dans une Bangui dévastée par la guerre civile et en proie aux exactions des milices de la Seleka, bientôt remplacée par l’armée du nouveau pouvoir en place, mais toujours largement composée de mercenaires tchadiens et de supplétifs soudanais, en plus des troupes régulières. Malgré les heurts fréquents avec la population, un semblant de normalisation s’installe ; pourtant, la progression des Anti-Balaka, ces combattants issus des groupes d’autodéfense venus des campagnes, majoritairement chrétiennes, vient semer toujours plus de trouble et enclencher une nouvelle spirale de violence.
Entre partisans du nouveau et de l’ancien régime, entre chrétiens et musulmans, entre mercenaires étrangers et soldats gouvernementaux, et jusqu’entre troupes mandatées par l’Union Africaine, les dissensions sont généralisées et un désordre grandissant s’enracine dans le pays. La crainte d’affrontements interconfessionnels d’ampleur et le spectre du génocide rwandais précipitent l’intervention de l’ONU puis de l’armée française, l’opération Sangaris est initiée le 5 décembre 2013. L’essentiel de ce deuxième volume est consacré à décrire les quelque trois semaines de chaos qui vont suivre, les pillages, les lynchages, les flux et reflux des diverses factions laissant une traînée de morts à chaque passage et leurs cycles continus d’atrocités et de vengeances consécutives. Ce n’est que très progressivement qu’une ébauche de calme revient dans la zone aéroportuaire contrôlée par les Nations Unies.
Est-ce parce que Didier Kassaï est plus directement touché par les événements que dans le tome précédent, toujours est-il que le ton est un peu plus grave et moins truculent que dans la première partie de son récit. Il continue bien de rendre compte de l’aspect dérisoire et grotesque des combats, mais le lecteur ressent davantage la peur et l’oppression des familles prises en étau entre les différents partis. Il faut dire qu’étant lui-même un chrétien marié à une musulmane, l’auteur est particulièrement exposé aux violences téléguidées par l’un ou l’autre camp.
Si l’écriture est plus austère et factuelle, le graphisme en revanche a encore gagné en virtuosité. Toujours composées de larges vignettes aux nombreux détails révélateurs, les planches se parent de couleurs somptueuses, l’auteur démontrant une impressionnante virtuosité à l’aquarelle dans le rendu des matières et la gestion de la lumière. En composant un alliage unique entre l’aspect caricatural de ses personnages et l’aspect naturaliste des décors, il crée une atmosphère à même de transcrire la complexité des enjeux et la triste obscénité du drame centrafricain. S’achevant au lendemain de Noël, cet épisode en appelle un troisième pour évoquer la fragile reconstruction du pays.
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