« Aux Beaux-Arts et ailleurs, les anciens profs ont été écartés, souvent sans ménagement, pour faire place à de jeunes révolutionnaires qui se sont ensuite accrochés à leur siège pendant des décennies ! »
Anniversaire oblige, Des ronds dans l’O réédite Mai 68, histoire d’un printemps. Au jour le jour, l’historien Arnaud Bureau rappelle les moments les plus significatifs de l’insurrection, presque exclusivement de la perspective des étudiants. Le lecteur y découvre un mouvement qui prend racine à l’Université de Nanterre où les garçons réclament le libre accès aux résidences des filles, avant de fleurir dans le Quartier latin, puis de retourner dans la banlieue, cette fois dans les usines. Menés par le beau et charismatique Daniel Kohn-Bendit, les insoumis sont divisés ; les opinions se multiplient : trotskistes, maoïstes, anarchistes, féministes et syndicalistes entremêlent leurs revendications dans un joyeux capharnaüm.
Le récit est extrêmement fragmenté. En une ou deux pages, l’auteur explique avec précision comment les choses se sont passées tel jour à tel endroit. Bien que certains intervenants reviennent ponctuellement, il n’y a pas de réelle figure dominante dans cet exercice journalistique qui sollicite une multitude de participants. Le dernier chapitre est consacré à l’héritage du soulèvement. Les reporters y présentent les points de vue d’observateurs qui mesurent les conséquences de la révolte. De façon générale, il semble que les événements, aussi mythiques soient-ils, n’aient pas eu un impact tangible sur la société française.
Les personnages dessinés par Alexandre Franc se révèlent peu expressifs et les décors sommaires, comme s’ils devaient se faire discrets pour ne pas distraire du propos. La plupart des planches ont une allure très carrée, d’autant plus que les cases sont séparées par de larges espaces ; une sévérité en contraste avec le climat d’anarchie au cœur du projet. Les illustrations sont essentiellement utilitaires et il en va de même pour les couleurs, lesquelles se résument à : du noir, du bleu et du rouge, avec parfois des demi-teintes. Le livre étant imprimé sur un papier blanc, certaines compositions se donnent pratiquement des airs de drapeau ; c’est ironique ou du moins amusant.
Un éclairage historico-journalistique sur un phénomène social qui aura marqué durablement la psyché hexagonale.
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