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édéiste vaguement désabusé, José Pablo Garcia a l’occasion de réaliser un reportage sur les terres occupées de la Palestine. Accompagné d’un représentant d’Action contre la faim (l’association coédite l’ouvrage), il découvre la pauvreté et le sort d’un monde bousculé par l’envahisseur ; l’eau potable, l’accès à la nourriture et un logement décent y sont des denrées rares. Dans cet univers où peu d’emplois sont disponibles et où la liberté de mouvement est restreinte, les gens survivent comme ils le peuvent. Ils ont depuis longtemps compris que ce qu’ils construisent ou ce qui leur est donné par les organismes d’aide humanitaire sera tôt ou tard détruit par l’occupant.
Le ton adopté se révèle didactique : rappels historiques, évocation de lois et de règlements, sans oublier les très nombreuses statistiques. Les chapitres, généralement un par endroit visité (Jérusalem, Hébron, Ramallah, Naplouse, etc.), sont brefs, juste assez pour constater l’état du désastre, sans vraiment analyser les causes ou désigner un coupable. L’auteur porte son regard sur la vie de tous les jours et, dans toute sa banalité, ce quotidien a plus de force qu’une fugace nouvelle sur un hôtel détruit par un groupe de terroristes.
Le dessin en bichromie s’avère minimaliste ; les personnages sont schématiques et les décors épurés. Certains objets techniques (canalisations, céramiques ou génératrices) sont tout de même croqués avec plus de précision. Enfin, les cartes du territoire illustrent avec quantité de détails l’occupation des lieux et les déplacements de population. Pour tout dire, les illustrations occupent un rôle secondaire et sont au service de la démarche de sensibilisation à la misère de ce peuple. Elles n’ont pas pour fonction d’enjoliver et il serait vain d’y chercher un second niveau de lecture.
En fin d’album, le narrateur se demande comment mettre tout cela dans une bande dessinée. Plutôt que de tout évoquer, peut-être aurait-il été intéressant de creuser et d’explorer les situations afin d’approfondir davantage le destin de quelques-uns des acteurs. Vivre en terre occupée n’est sans doute pas un chef-d’oeuvre du neuvième Art, mais son propos demeure nécessaire. Il est d'ailleurs dans l'ère du temps, alors que Leila Abdelrazaq aborde sensiblement le même sujet dans Baddawi, une enfance palestinienne.
Un peuple qui a été vaincu par la guerre et qui vit depuis plus de 50 ans en terre occupée, c'est un malheureux classique de l'histoire. Ainsi la Gaule a été occupée par les romains durant plusieurs siècles. Cependant, il s'est passé quelque chose comme par exemple une assimilation des cultures dans une pax romana. Gagner la guerre est une chose, réussir la paix est une autre bataille à mener.
C'est vrai que cet ouvrage vient se rajouter à de nombreux autres sur ce sujet très épineux. J'ai bien aimé ce témoignage d'un auteur espagnol José Pablo Garcia qui accompagne une organisation humanitaire telle qu'Action contre la faim. Il explore le quotidien de ces habitants de Cisjordanie et de la bande de Gaza. Les enfants et plus largement les humains ne devraient pas vivre dans des conditions pareilles. On peut alors comprendre leur révolte.
Un mot sur le dessin pour dire que j'apprécie ce style semi-réaliste. Il y a parfois une densité de texte notamment dans la narration. Mais il est vrai que l'auteur se plaignait en fin d'ouvrage pour indiquer qu'il n'arriverait pas à mettre tout ce qu'il a vécu et ressenti dans une bd.
Une oeuvre utile sans parti pris pour voir les conséquences d'une situation désastreuse.