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aika demi-loup, toujours accompagnée de Kippa et du chat Maître Ren, a rejoint Thyria, la cité de l’Impératrice des vagues, afin d’enquêter sur son passé et sur les agissements de sa mère, Moriko. Dans une demeure ayant appartenu à cette dernière, elle retrouve une clef dans une cache secrète. En la montrant à Seizi, pirate et ancien compagnon de Moriko, elle apprend qu’elle provient de l’île des os. Malgré la malédiction qui pèse sur ce lieu, elle décide de s’y rendre car elle n’a pas le choix. Elle veut comprendre comment – et pourquoi – elle en est arrivée à partager son corps avec un monstre.
Dans ce deuxième tome, Marjorie Liu continue de construire habilement son intrigue. Loin de se précipiter sur les aspects épiques qui ne demandent qu’à s’enflammer, et ne perdant jamais de vue la trame principale, elle s’attache à faire vivre ses personnages. Maika est bien entendu au centre de toutes les attentions. L’autrice explore encore plus la psychologie de son héroïne, livrant ses pensées et ses tourments intérieurs. Mais les autres intervenants ne sont pas négligés. De nouvelles têtes apparaissent et, comme celles déjà connues, elles peuvent être charismatiques, attachantes, intrigantes ou encore inquiétantes.
Dans un univers angoissant et violent qui ne cesse de gagner en épaisseur et en cohérence, la narration ne souffre d’aucun temps mort. Entre la quête de la jeune femme, le destin de peuples prêts à s’entredéchirer et la menace des anciens dieux, le récit est toujours plus intense et ambitieux. L’ensemble des enjeux, des interactions et des possibles tient le lecteur en haleine pourvu qu’il ne soit pas impatient et se laisse capter par cette richesse.
L’aventure est superbement portée par le graphisme de Sana Takeda. Son trait fin et ses choix de cadrage et de découpage allient plaisir du regard et efficacité narrative. Le soin apporté à la caractérisation de toutes les créatures ainsi qu’aux éléments décoratifs confère une vraie consistance aux scènes et donne vie au monde de Maika.
Après un lancement réussi, Monstress confirme toute sa puissance et son intérêt.
La chronique du tome 1
Demi-loup a réchappé à ses poursuivants et fait "connaissance" avec le démon qui l'habite. Elle part en terres arcaniques où d'anciens amis de sa mère lui apprennent qu'elle peut en savoir plus sur son passé et sur le mystérieux masque en se rendant sur l'ile des os...
Monstress est un étonnant alliage du manga (les deux auteures sont d'origine asiatique) et du comics, exploitant un très large format (plus de 160 pages couleur par album) pour développer un univers de magie très original. Si le T1 demandait une grande concentration de part la quantité d'informations sur les factions et sur le monde présenté, le second volume suit une trame plus linéaire et donc plus lisible. Le design général des monstres comme des arcaniques est toujours aussi fascinant, l'illustratrice reprenant le thème des hommes-animaux, avec le plaquage de superbes textures informatiques qui fait la marque visuelle de cette série. Si les arrière-plans et décors sont un peu délaissés comme sur beaucoup de BD américaines et japonaises (du fait de la pagination très volumineuse), nombre de cases voir de pleines pages sont magnifiques, rappelant par moment la foison des BD d'Olivier Ledroit. L’ensemble demande du reste une attention particulière, tant visuelle qu'intellectuelle étant donné que le nombre de textes reste important. Ainsi Monstress s'adresse en priorité aux adultes, ne serait-ce que par la violence de certaines séquences. L'édition française suivant de près l'édition américaine il est probable que les aventures de Maïka demi-loup durent encore quelques années étant donnée la tournure prise par l'histoire à l'issue de ce second volume. Les amateurs de mondes complexes, des mythologies de fantômes et dieux-démons chinois adoreront.
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