Ça ne va pas fort pour Renata. Les crises d’angoisse se succèdent, la dépression et le doute s’installent. Quand elle se fait voler son ordinateur contenant le manuscrit qu’elle est sur le point d'achever, c’est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Se sentant abandonnée par les siens, elle commence à traîner sur le pavé. À quoi bon lutter ? Autant partir en beauté.
Avec Comme un frisson, Aniss El Hamouri signe un premier album appliqué, fort et percutant. Il anime son héroïne et sa distribution avec une énergie qui rappelle beaucoup celle duo Jano – Tramber des débuts de Kebra. Le côté « destroy » de la narration est intelligemment contrebalancé par la fragilité de Renata. Fissurée au plus profond de son for intérieur, le portrait de la jeune femme s’avère convaincant et effrayant. L’écriture est également maîtrisée, les aléas et les rencontres – les improbables Corbeau et Beluga - s’enchaînent naturellement malgré le chaos ambiant. De plus, l’auteur a fait bien attention à refermer les différents arcs de son récit, y compris jusqu’à l’ultime révélation.
Graphiquement, le trait trouve son influence dans le monde alternatif. Encore en recherche de son style, le dessinateur met quelques pages à trouver ses marques. Un peu expérimental au début, le découpage devient rapidement plus posé, heureusement sans perdre sa fougue. Tout n'est évidemment pas totalement en place, mais une patte personnelle est en train de se construire au fil des planches.
Relecture façon BD-rock de Trainspotting teintée des défis auxquels font face les Milléniaux, Comme un frisson s’appréhende tel un coup de poing dans la figure. Aniss El Hamouri réalise là une fracassante entrée dans le paysage du Neuvième Art. Merci aux éditions Vide Cocagne de lui avoir donné sa chance.
D'abord intrigués, ensuite effarés, puis entièrement envoûtés par la rencontre improbable de Renata, Corbeau et Beluga, nous sommes plongés dans un univers rappelant les premières pages de Blast. Et quelle fin frappante ... Beau premier roman graphique - vivement conseillé !