L
e visage émacié et vêtus de guenilles, Guilhem et Mariel parcourent depuis plusieurs mois les grottes qui trouent le Mont des Égarés. Si la foi de son ami se fissure, ni le froid, ni la faim ne font vaciller la détermination du guérisseur car en ces montagnes sacrées où même les pierres semblent en prières, les fantômes du passé l'accompagnent et le guident dans son errance. Le but est commun à celui des autres pauvres diables qui cherchent l'introuvable, la mythique cathédrale du vide. Sanctuaire sacré pour les parfaits, temple impie pour les catholiques, le labyrinthe qu'elle contient est sensé répondre aux questions qui taraudent Guilhem. Mais l'inquisiteur Arnaud Gui a la traque tenace, il trouvera lui aussi ce lieu mythique, quitte à s'y perdre...
Ce septième tome termine la série commencée il y a presque dix ans. Makyo avait-il en tête, dès l'origine, le dénouement final ? Il offre une conclusion épurée, délestée de ses éléments romanesques et ne conserve que la quête initiatique et spirituelle de son héros vertueux. Le personnage de l'ecclésiastique, total opposé de Guilhem, permet de confronter deux visions, le fanatisme aveugle versus la vertu altruiste. Les scènes oniriques se mélangent subtilement à la réalité pour prendre le dessus, symbolisant et concrétisant la réflexion et le cheminement intérieur du cathare. Le doute pour le lecteur est constant quant à la véracité des faits, les visions sont-elles provoquées par la faim, les émanations de soufre ou proviennent-elles d'une réelle révélation ? Peu importe car, au demeurant, il ne peut y avoir de réponse nette et précise à ce genre d'interrogation. Peu de dialogues, mais des échanges qui vont au delà de la religion, démontrant une portée universelle. La narration est assurément une réussite car l'auteur, inspiré et clair dans son propos, évite toute lourdeur et verbiages.
Le graphisme réaliste d'Alessandro Calore maintient son haut niveau de qualité et d'exigence, notamment dans ses superbes vues en perspectives. Les couleurs de Claudia Checcaglini installent naturellement les diverses ambiances, volontairement ternes pour les paysages arides (monochromes peu contrastées), et des tons chauds et flamboyants dans la cathédrale excavée.
«Nul ne peut atteindre l'aube sans passer par la nuit» selon l'apôtre Jean. Ces paroles pourraient s'appliquer à cette lecture atypique, attentive et exigeante, qui déroutera certainement pour qui n'attend que pur divertissement de l'esprit. Les débuts sous forme d'histoire médiévale plutôt classique aboutissent à une réflexion philosophique sur soi : une métaphore brillante et profonde d'un chemin de vie.
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