A
pril (ou May ou June, ça dépend des jours) est en fuite avec son fils, Eugene. Ils ont pour principal bagage plusieurs sacs pleins d’argent. La jeune femme a participé à un vol audacieux : avec ses complices, elle a simultanément braqué cinquante-deux banques, bureaux de poste et commerces à Prescott, quelque part aux États-Unis. La police était débordée et personne ne s’est fait pincer. Bref, la combine a fonctionné. Mais voilà que peu à peu les bandits sont retrouvés assassinés. Comme quoi il est judicieux d’y penser par deux fois avant de faire confiance aux délinquants.
Le « road movie » de Max De Radiguès est prenant. Les acteurs sont attachants ; particulièrement la relation entre la criminelle et le garçon aux réparties caustiques. L’étrange lien qui unit les fuyards est d’ailleurs l’élément le plus intéressant de cette chronique : tantôt complices, tantôt amis, tantôt mère-enfant, sans qu’on sache qui des deux a le plus de maturité. Bien que le nombre de planches soit imposant (174), certains rebondissements sont abrupts ; en fait, c’est l’écoulement du temps qui est embêtant. Le lecteur a l’impression que l’histoire se déroule à toute vitesse alors que dans les faits, il se passe plusieurs mois, voire quelques années. Certains segments de la vie des protagonistes sont ainsi peu développés ou ignorés. Une simple division en chapitres avec des repères chronologiques aurait permis de mieux articuler l’ensemble. Peut-être faut-il préciser que le récit est d’abord paru en feuilleton. L’abonné qui l’a découvert sur une très longue période (entre mars 2014 et décembre 2015) n’a probablement pas ressenti le même embarras puisque la livraison en seize opuscules assurait naturellement le découpage de l’action.
Le livre est imprimé en format poche, le dessin est en noir et blanc, il compte généralement trois bandes de deux cases, les personnages sont schématiques et les décors concis. Ce minimalisme est efficace, il accélère notamment le rythme, ce qui n’est pas un défaut pour rendre l’esprit d’une telle cavale. Il permet également de réaliser de beaux effets, par exemple en interrompant brutalement la lecture pour présenter une collision de voiture, en gros plan, sur une double page.
Un roman graphique sympathique qui a le charme de l’artisanat.
Je ne suis pas forcément fan de ce type de dessins, par goût personnel. Mais dès que vous commencer à lire, pas vraiment moyen d’arrêter. L'histoire est bonne, et bien racontée, donc de la bonne BD.