« Ils violèrent leur Mère, la Terre, et l’immobilisèrent au moyen de chaînes de sorcellerie. La Lune prit feu ; le soleil gela ». Et ce fut un big bang inversé. Les éléments se figèrent. Des lignées humaines disparurent, d’autres devinrent monstrueuses. L’une d’elles asservit les autres, menée par son seigneur, nommé simplement Tyran. Mais la Terre-Mère, quoique moribonde, est animée d’un désir de vengeance. Alors, elle rallie Ver, immonde et insignifiante créature à trois jambes, dont la tribu est le garde-manger des dominants. Ver parvient à dérober un parchemin précieux. Commence alors une quête qui emmènera le gnome en des lieux et des situations que sa frêle imagination n’aurait pu engendrer.
Si Adrian Smith est peu connu dans le monde de la bande dessinée (on ne lui doit à ce jour que Broz qui n’a guère marqué les esprits), il est un illustrateur de renom de la licence de jeu Warhammer, notamment via son magazine officiel White Dwarf. Les connaisseurs en déduisent ainsi que Hate se déploie dans un univers typiquement Heroic Fantasy, dans des paysages de désolation peuplés d’êtres à la laideur exacerbée ou à la musculature surdimensionnée. S’y affrontent des esclaves, des gladiateurs, des rebelles et autres guerriers, en des combats épiques.
Smith a fait le choix d’un noir et gris oppressant, rendant parfaitement l’atmosphère de cendres de ces contrées sans soleil. Les formes émergent à peine des ténèbres, les décors sont flous, les ciels sont constamment menaçants. Mais son art est surtout celui des faciès terrifiants et des corps hypertrophiés. Ses monstres renvoient aussi bien la puissance que la peur, l’abnégation que la folie. Les regards sont sombres ou désespérés, jamais sereins. L’univers de Smith est en tension permanente.
Du point de vue narratif, il a fait des choix radicaux. Les dialogues sont quasiment inexistants, sans que cela nuise à la compréhension de l’intrigue. Par ailleurs, l’approche du dessin, typique de l’illustrateur qui aborde chaque case comme une œuvre à part, étire parfois exagérément les situations ou les scènes, tant le souci de saisir les visages ou les positions corporelles est prégnant. Ces séquences peuvent être prises comme des ralentis au sens cinématographique du terme, mais constituent parfois une pesanteur dans un récit de 280 pages.
La puissance du graphisme est à louer sans retenue, tandis que le découpage aurait mérité davantage de fluidité. Celles et ceux qui ne sont pas lassés par le schéma qui met en scène un personnage modeste bouleversant l’ordre d’un monde (on pense au Seigneur des anneaux ou au Grand Pouvoir du Chninkel) se délecteront de cet album très codifié mais visuellement envoûtant.
Adrian Smith est l’un des designers de l’univers Warhammer. Il y a trois ans il proposait aux amateurs de BD de découvrir une odyssée barbare dans la quintessence de la Dark Fantasy que les joueurs de wargames Game Workshop connaissent bien. Libre de toute contrainte il nous narrait l’itinéraire de Ver, insignifiante créature humanoïde, difforme, pourvue de trois jambes, que le destin a placé en possession d’un parchemin capable de libérer la Déesse Nature, emprisonnée par des rois-barbares sanglants… A noter que l’album comprend un cahier final de portraits de guerriers, très poussés… souvent plus que les pages de l’album lui-même…
Il serait abusif de parler de Bande-Dessinée à propos de Hate. D’une par car il faut bien l’avouer, le scénario est totalement insignifiant et simple prétexte à dessiner les pérégrinations du très sympathique personnage au sein de landes terrifiantes, de batailles sanglantes et de cavernes putrides. Étonnamment c’est ce petit personnage muet et insignifiant qui est la première réussite du livre! [...]
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Sur le fond, "Hate" est assez proche du «Grand pouvoir du Chninkel» sauf qu’au lieu de la Bible que Van Hamme avait choisi de revisiter, ici, c’est l’Enfer que l’on visite avec A. Smith. Tout n’y est qu’effroi, guerre et chaos. C’est ce background apocalyptique qu’un misérable gnome, difforme et souffreteux arpente de ses trois jambes, en échappant - toujours plus miraculeusement - à la meute de guerriers démoniaques lancée à ses trousses pour, peut-être, changer la face du monde...
Cette fresque ténébreuse ne semble en fait qu’un prétexte pour mettre en scène une phénoménale galerie de monstres.
Rien de neuf, toutes ces créatures sont déjà vues et revues mais sont ici sublimées par un graphisme d’une force inouïe. Les planches de Smith ont une ampleur et une puissance que je n’avais encore jamais vues en BD. Et c’est, paradoxalement, le seul et énorme défaut de cet album hors norme. Pour l’apprécier il faut en accepter le concept : Des illustrations extraordinaires au service d’un récit quasi muet, d’une banalité si navrante qu’il en devient une espèce de farce macabre, presque parodique.
A réserver aux amateurs de Dark Fantasy pour qui "Hate" sera un chef d’œuvre absolu !
Un OVNI graphique ! Le dessin est époustouflant, tout en noir et blanc, avec un mouvement remarquable et une inventivité du graphisme et de la mise en scène à couper le souffle.
Certes le scénario est un peu plat, mais les 280 pages sont d'une telle richesse visuelle que c'est un livre que je vais rouvrir régulièrement, pour le plaisir des yeux. Ca vaut le détour.
4/5
Album indispensable pour la qualité du dessin !
C'est sombre, c'est magnifique !!
On n'achète pas cet album pour la profondeur du scénario mais on se laisse néanmoins porter par le destin de ce petit être difforme.